Guerre en Ukraine : ce que prévoit le plan de la Commission européenne pour "réarmer l’Europe"

L'Europe hausse le ton. Quelques heures seulement après l'annonce du gel de l'aide militaire américaine à Kiev, la Commission européenne a présenté son plan de défense, mardi 4 mars. Baptisé RearmEurope ("réarmer l'Europe"), ce projet, dévoilé par Ursula von der Leyen à Bruxelles, doit permettre d'injecter jusqu'à 800 milliards d'euros dans la défense du Vieux Continent.

Dans un courrier envoyé aux dirigeants européens, la présidente de la Commission européenne détaille les cinq volets de ce programme, dont une aide immédiate à l'Ukraine, alors que Donald Trump menace de cesser définitivement de soutenir le pays en guerre depuis l'invasion russe de 2022.

Un prêt de 150 milliards d'euros 

Les Etats membres de l'Union européenne (UE) pourront financer des investissements dans la défense en empruntant à l'Union européenne. Une enveloppe de 150 milliards d'euros sera déployée et mise à disposition des Vingt-Sept. Selon Ursula von der Leyen, elle doit en priorité servir à investir dans la défense anti-aérienne, les missiles, les drones et les systèmes anti-drones, la cyberdéfense ou les systèmes d'artillerie. Dans un communiqué, l'Allemande estime qu'avec cette aide, "les Etats membres pourront renforcer massivement leur aide à l'Ukraine. Donc, une aide militaire immédiate à l'Ukraine". 

L'activation de la clause de sauvegarde pour dépasser les 3% de déficit public

Ursula von der Leyen veut également inciter les Etats membres à dépenser davantage pour leur défense. Dans cette optique, ils ne seront plus soumis à des sanctions si leur déficit public excède les 3% du PIB. C'est le mécanisme de la clause de sauvegarde, qui avait déjà été activé durant la pandémie de Covid-19, de 2020 à 2023. Cette clause n'avait pas été reconduite en 2024, entraînant une procédure de déficit excessif visant sept Etats membres, dont la France.

L'activation de cette clause "permettra aux Etats membres d'augmenter de manière significative leurs dépenses de défense sans déclencher la procédure de déficit excessif", a déclaré la présidente de la Commission. "Si les Etats membres augmentaient leurs dépenses de défense à hauteur de 1,5% de leur PIB, cela représenterait 650 milliards d'euros sur quatre ans", estime-t-elle. Les prêts contractés par les Etats membres dans le cadre de l'enveloppe globale de 150 milliards d'euros bénéficieront de cette clause, précise-t-elle dans son courrier.

Des fonds de cohésion au service des investissements dans la défense

Avec ce plan, la Commission souhaite encourager les investissements dans la défense par le biais des fonds de cohésion de l'UE. Ces fonds servent au développement des régions pour financer, par exemple, de grandes infrastructures routières ou ferroviaires. Ursula von der Leyen veut faciliter leur utilisation pour financer des projets de défense, en assouplissant certaines règles et en mettant en place des mécanismes d'"incitation". Ces fonds sont budgétés à hauteur de 392 milliards d'euros pour la période 2021-2027, mais elle ne fixe pas d'objectifs chiffrés quant à la part de cette enveloppe qui serait allouée au secteur de la défense. 

Faciliter le recours à la Banque européenne d'investissements (BEI) et au secteur privé

La Banque européenne d'investissements (BEI) n'est actuellement pas autorisée à financer des projets directement liés au secteur de la défense. Mais la présidente de la Commission européenne a annoncé que l'institution détaillerait prochainement les changements qui lui permettront d'"élargir" son champ d'action. Sa présidente, Nadia Calvino, a appelé à élargir les investissements éligibles, selon une lettre consultée mardi par l'AFP.

Enfin, la Commission européenne veut davantage mobiliser le secteur privé pour le financement de la défense en Europe. Les banques sont réticentes à s'engager dans des projets d'investissements militaires, pour ne pas prendre de risques concernant leur notation par les agences financières.

Les dirigeants des 27 Etats membres discuteront de ces mesures jeudi à Bruxelles, à l'occasion d'un sommet extraordinaire. Ils examineront aussi une proposition de la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, pour renforcer l'aide militaire à l'Ukraine, jusqu'à 30 milliards d'euros.