Oleg gare la camionnette siglée du logo jaune d’Ukrposhta – la Poste publique ukrainienne – devant la mairie du village de Chevtchenko. Tamara, assise à l’arrière, ouvre la porte et déplie la tablette située devant elle d’un geste machinal. Elle rassemble ses feuilles, vérifie ses dossiers, jette un regard rapide sur les colis entreposés à l’arrière. Tamara travaille depuis dix-sept ans à la Poste. Toutefois, depuis quelques semaines, elle ne quitte plus son épais gilet pare-balles noir. « C’est inconfortable quand on est assis », dit-elle dans un sourire. Depuis que la guerre fait rage à quelques kilomètres de là, Oleg et Tamara ne sortent plus sans leur équipement de protection.
Autour de la camionnette, les passants commencent à affluer : les uns poussant un vélo, les autres tirant un cabas à roulettes. Au-dessus d’eux, la silhouette du père de la poésie moderne ukrainienne, Taras Chevtchenko, jette une ombre inquiétante. L’ambiance est à l’orage : hier…