Renault Master, Dacia Jogger, quad Yamaha… Leur folle métamorphose pour la caravane du Tour de France

Dans un atelier de la petite ville de Jouy (Eure-et-Loir), se jouent les préparatifs de l’une des traditions les plus importantes du Tour de France : la fameuse caravanes publicitaire. Ici, à quelques jours du départ de la compétition, prennent vie 60 des 150 véhicules qui composent ce cortège unique, véritable institution née en 1930 et devenue indissociable de la Grande Boucle.

Ce sont en ces lieux que résonnent les bruits caractéristiques d’un chantier d’ampleur. Le sifflement du chalumeau des serruriers qui découpent et soudent les châssis, le vrombissement des scies des menuisiers façonnant les structures en bois, le travail minutieux des sculptrices et des peintres qui viennent façonner tous les éléments de décorations. Chaque corps de métier apporte son expertise à cette alchimie créative où l’artisanat traditionnel se met au service du marketing publicitaire.

Basic-Fit la nouvelle venue

Prenons l’exemple d’une nouvelle venue de l’édition 2025 : la caravane Basic-Fit que la marque présentait à la presse le 24 juin. Premier ingrédient pour une caravane réussie : trouver des véhicules faciles à transformer. Un utilitaire Renault Master, deux Dacia Jogger et un quad Yamaha. Mais il ne faut surtout pas s’attacher à cette matière première, car elle subit sans attendre une métamorphose radicale.

Les serruriers ont vite procédé à l’ablation complète de la cabine du Renault Master, libérant un plateau entier sur lequel pourront être installés des éléments de décor. Les deux Dacia Jogger ont vu leur silhouette transformée par l’ajout d’une cabine complète montée sur leur toit, et le quad a, lui, été recouvert par une sculpture géante du sac à dos Basic-Fit. Aux manettes de la transformation : Nicolas Pécourt, et son associé Max Routhiau, de l’agence d’événementielle BBN.

Avant même que les serruriers n’entament leur travail de transformation, ce sont eux qui doivent penser un décor capable de capter l’attention du public, à trente-quatre kilomètres par heure, vitesse moyenne de défilement de la caravane sur les routes du Tour. Le véhicule doit raconter une «histoire facilement compréhensible», explique Fabien Rouget, porte-parole Basic-Fit. Cette recherche d’efficacité communicationnelle guide toutes les décisions créatives. Les zones d’affichage sont calculées pour une lisibilité optimale depuis les bords de route, les couleurs choisies pour leur impact visuel, et la typographie dimensionnée pour rester déchiffrable en mouvement.

Un travail qui dure depuis le mois d’avril

Concrètement, le travail pour mettre sur pied la caravane de Basic-Fit a commencé dès le mois d’avril. Avec d’abord en tête, le cahier des charges imposé par l’ASO (Amaury Sport Organisation, agence d’organisation du Tour) : hauteur maximale de 3,80 mètres, normes d’émissions de plus en plus strictes, et dispositifs de sécurité obligatoires (harnais et ceinture de sécurité, dispositif anti retournement du véhicule...) Ensuite, les deux compères de l’agence BMN peuvent compter sur leur expérience. «Il y a une dizaine d’années, nous avions remarqué une surchauffe permanente des moteurs sur les Renault Master, nous avions donc rectifié le tir en ajoutant des grilles d’aération sur les structures de décor», explique Nicolas Pécourt.

Passé les contraintes techniques et normatives, c’est l’art et la création qui reprennent le dessus. Pour la caravane Basic-Fit, l’enjeu principal était de reproduire fidèlement le sac à dos iconique. Faustine Perret, accessoiriste décoratrice de l’atelier raconte les défis de cette conception : «Il a fallu définir la taille finale. Au début, on travaille à l’échelle sur une maquette, mais on a été obligé de changer. La taille reproduite du sac ne rentrait pas sur le quad... Donc dès le départ, l’échelle du sac ne correspondait pas à la réalité...»

À partir de cette première contrainte dimensionnelle, l’équipe a dû redéfinir entièrement les proportions. «On s’est alors dit : quelle taille doit avoir ce sac pour se rapprocher le plus du réel? Il fallait aussi garder le bon placement des poches, les formes rectangulaires, le fait que ça soit un sac qui se tienne... mais qu’il y ait quand même du volume, qu’il paraisse authentique...» 

Une des sculptures de la caravane Basic-Fit, avec les accessoiristes au travail Le Figaro

Un travail minutieux qui trouve une résolution grâce au savoir-faire artisanal de l’atelier. «On prend des blocs de polystyrène, on découpe certains blocs au fil chaud pour dégrossir la forme, puis on affine avec des couteaux et du papier à poncer, détaille Faustine, ensuite viennent les résines époxy qu’on mélange et avec lesquelles on imprègne un tissu pour donner la texture finale». L’un des défis les plus délicats reste la reproduction des détails qui font l’authenticité de la caravane : comment faire en sorte que les plis du sac paraissent naturels, qu’ils ne fassent pas ’drap’ ? «La forme est forcément un peu abîmée pendant le processus, il faut inlassablement poncer et retendre les formes, puis effectuer les petites retouches de peinture», répond l’accessoiriste.

Dernière ligne droite

Dix gros jours avant la première étape du tour de France, cela va être au tour des commissions de sécurité de vérifier la conformité de chaque véhicule de la caravane, et de tester l’ergonomie des postes pour les hôtes et hôtesses, ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité. Pour Basic-Fit, cette première participation au Tour de France, va être l’occasion de se révéler aux yeux du monde. « Pour une marque, c’est un événement qui imprime dans le monde entier, et celui-ci a du sens avec nos valeurs de dépassement de soi », souligne Fabien Rouget. Partenaire du classement par équipe, la marque a signé un contrat de quatre ans, et veut témoigner de son engagement sur la durée dans cette aventure unique qu’est le Tour de France.

Du côté de l’atelier de Jouy, chaque coup de pinceau, chaque soudure, chaque ajustement participe à perpétuer la magie d’une tradition centenaire. Une tradition qui continue donc d’évoluer, avec chaque année l’arrivée de nouvelles marques sur le Tour.