Sommet de la Communauté politique européenne : l'Albanie joue les bons élèves
Pour l'Albanie, petit pays balkanique de moins de trois millions d'habitants, c’est un moment historique. Le Premier ministre Edi Rama se dit "fier que le 16 mai, les dirigeants de tout notre continent de démocraties, de Londres à Kiev et d'Oslo à Ankara, se réunissent au cœur de Tirana pour le sommet de la Communauté politique européenne." Et d'ajouter que "l'Albanie a été choisie pour accueillir cet événement important parce qu’elle est déjà considérée avec respect."
L'Albanie a souhaité organiser ce sommet dans le lieu le plus prestigieux, symbolique et central de tout le pays : la place Skanderbeg à Tirana, cœur du "Pays des Aigles". Son but est de montrer que face à l'agressivité de la Russie, la grande Europe est présente et que le moment est important pour l'unité de l'Europe et l'avenir de l'Ukraine. Le président ukrainien Volodomyr Zelensky est présent à Tirana pour ce sommet.
La CPE, une création récente
La Communauté politique européenne, projet porté par le président français Emmanuel Macron, est née en 2022. Elle regroupe 47 pays de l’Europe au sens géographique du terme – soit près de 700 millions d'habitants – et va donc bien au-delà des frontières politiques de l'Union européenne. Dans le détail, sont membres de la CPE les 27 pays de l’UE, les neuf pays candidats (Albanie, Monténégro, Macédoine du Nord, Serbie, Bosnie-Herzégovine, Moldavie, Ukraine, Turquie et Géorgie), l'Arménie qui toque elle aussi à la porte du club européen – son Parlement national vient de voter le principe d'une candidature – les quatre pays de l'AELE, l'Association européenne de libre-échange (Norvège, Suisse, Islande et Lichtenstein) ainsi que six autres pays européens : Andorre, Azerbaïdjan, Kosovo, Monaco, Royaume-Uni et Saint-Marin.
Cette nouvelle structure institutionnelle est proposée pour la première fois par Emmanuel Macron le 9 mai 2022, moins de trois mois après le déclenchement de la guerre en Ukraine, lors d'un discours devant le Parlement européen à Strasbourg, dans le cadre de la Conférence sur l'avenir de l'Europe. Le projet est présenté officiellement par le président français les 23 et 24 juin 2022 à Bruxelles lors d'un Conseil européen. Ouvrir une Communauté politique européenne à tous les pays du Vieux continent permet selon Emmanuel Macron de créer "un cadre politique dans toute l’Europe, pour traiter de sujets stratégiques sur une base géographique, de valeurs et de sécurité." Le premier sommet se déroule le 6 octobre 2022 à Prague, en République tchèque. Sécurité, énergie, climat et économie sont les principaux sujets traités par cette réunion. En mars 2023, le gouvernement britannique déclare soutenir les objectifs de la Communauté, fait notable après le Brexit. Peu après son élection, le Premier ministre Keir Starmer organise d'ailleurs le 4e sommet de la CPE au Palais de Blenheim, lieu de naissance de Winston Churchill.
Tirana tournée vers l'adhésion à l'UE
La sécurité, la stabilité et la prospérité du Vieux continent sont au menu de cette réunion de Tirana, mais aussi l'élargissement de l'Union européenne. Car si officiellement la CPE n’est pas une antichambre de l'UE, elle est un gage de stabilité pour les pays candidats à l'adhésion. L'Albanie, qui n’a jamais organisé de sommet international avec autant de participants, est très désireuse de faire partie de l'UE. Le Premier ministre Edi Rama vise une adhésion d’ici 2030. "L'Europe est le meilleur endroit où être et l'Union européenne est absolument la seule façon pour nous de regarder vers l'avenir, a t-il déclaré ce jeudi 15 mai dans un entretien à l'AFP. Pour nous, l'Europe est un territoire de paix et de sécurité perpétuelles", a-t-il ajouté.
L'Albanie a des atouts : elle décolle sur le plan économique, en particulier grâce au tourisme et à l'aide économique apportée par la diaspora albanaise. Sortie des années de dictature stalinienne d'Enver Hoxha, elle ne connaît pas la poussée nationale-populiste sensible dans le reste de l'Europe, et le paysage politique albanais est majoritairement pro-européen. La présidente de la Commission européenne semble très allante. Au lendemain de la réélection d'Edi Rama, Ursula Von der Leyen a ainsi lancé : "L'Albanie a sa place dans l'UE".