« Opération Afrique » : comment le continent est devenu le champ de bataille de la guerre économique mondiale

Alors que l’Europe prône la fin de l’utilisation d’énergies fossiles sur le déclin, les solutions de remplacement la poussent vers l’Afrique. Mais bien qu’elle affiche des préoccupations écologiques, ses besoins en termes de transition énergétique provoquent là-bas bien des catastrophes environnementales. Les Africains, tiraillés entre les appétits chinois, allemands, français, peinent à concilier défense de la nature et développement économique.

Le documentaire de Jan-Philipp Scholz, Johannes Meier et Philipp Sandner révèle le cauchemar de l’exploitation des ressources sur le continent. Premier arrêt : la province de Lualaba, en République démocratique du Congo.

Un impensé colonial

Là se concentrent des gisements de cuivre, lithium, coltan, cobalt, qui entrent dans la composition des téléphones portables et batteries de voitures électriques : dans le monde, la moitié de ces dernières contiennent du cobalt venu du Congo, selon le film.

Or, l’exploitation de ces zones est peu réglementée, la sécurité inexistante, comme l’attestent ces images d’ouvriers qui descendent creuser à la main à 30 mètres sous terre sans appareillage respiratoire. Dans cet enfer environnemental, les entreprises chinoises sont omniprésentes.

Mais les Européens, bien que plus discrets, profitent également de l’exploitation problématique de ces ressources. Une « hypocrisie » (le mot reviendra beaucoup concernant l’Europe) selon Patricia Kashala, de l’ONG PremiCongo, car « ils en sont les premiers bénéficiaires ». Qu’ils composent ou non avec la Chine, d’ailleurs : « Toutes les matières premières y transitent avant d’arriver dans l’Union européenne », insiste Melanie Müller, de la fondation Science et politique de Berlin.

Les positions chinoises en Afrique les rendent « incontournables », mais une collaboration vertueuse n’est pas possible, estime le ministre allemand de la Coopération économique et du Développement, Jochen Flasbarth : « Pas facile de traiter avec des partenaires qui ne se posent aucune question sur le sujet. » Mais les Européens se les posent-ils jusqu’au bout ?

Le documentaire poursuit sa route en Namibie, sur les lieux d’un projet de fabrication d’hydrogène. Les investissements allemands, équivalents au PIB du pays (!), rassurent les autorités, mais subsistent des zones d’ombre sur le recrutement des employés, l’extension du site sur des zones historiques classées ou des réserves naturelles.

« Est-ce que la population allemande accepterait que ses marchés naturels soient transformés en installations industrielles pour produire de l’énergie ? » se demande Chris Brown, de la Chambre namibienne de l’environnement. « Et qu’on qualifie ça d’énergie verte ? Non, c’est de l’énergie sale qui détruit les paysages naturels et la biodiversité de la région. » Ou comment résumer, en quelques mots, l’impensé colonial qui régit toujours les relations diplomatiques et commerciales entre nos deux continents.

Opération Afrique. La course aux matières premières de demain, Arte, mardi 4 février 2025 à 22 h 35.

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