Sébastien Lecornu : l’éternel « changement » sans modification du macronisme
Comme un disque rayé. Nommés par un président de la République qui refuse de changer de logiciel, les premiers ministres se succèdent, à chaque passation de pouvoir, en entonnant le même refrain. Le perron de Matignon aura entendu Michel Barnier promettre en septembre 2024 de « faire de la politique autrement » : « Il y aura aussi dans cette nouvelle page des changements et des ruptures. »
Puis, trois mois plus tard, son successeur François Bayrou jurer qu’il ferait tout pour « trouver un chemin inédit ». Et neuf mois après, ce mercredi 10 septembre, Sébastien Lecornu clamant la main sur le cœur : « Il va falloir changer. » « Il va falloir des ruptures. Pas que sur la forme, pas que dans la méthode, des ruptures aussi sur le fond », a-t-il déclaré.
Et pourtant, depuis 2024, Emmanuel Macron comme ses premiers ministres refusent de voir qu’il n’existe pas de majorité à l’Assemblée nationale pour mener leurs politiques, et continuent à empêcher les débats et à mépriser la représentation nationale. Alors qu’il fait partie de l’aile droite de la Macronie, comment Sébastien Lecornu pourrait-il convaincre les oppositions de ne pas le censurer ?
Le PS et le RN dans le viseur
Le nouveau premier ministre promet de discuter, cette semaine, avec les représentants de chaque parti et des syndicats. Missionné pour reprendre en main le budget antisocial de François Bayrou, il lui faudra chercher des alliances et des compromis. Mais les portes semblent fermées, toutes les oppositions ayant laissé entendre, mardi soir, que son temps à Matignon était compté.
Lors de la passation de pouvoir, Sébastien Lecornu est resté mystérieux à propos de cette énième promesse de « rupture » – mot qu’Élisabeth Borne et Gabriel Attal, autres prédécesseurs à Matignon, ont tous deux prononcés lors de leurs déclarations d’intérêt général. S’il regarde vers sa gauche, une taxation des plus riches pourrait constituer un changement de pied du point de vue macroniste.
Certains commencent d’ailleurs à s’y résoudre : « Il faut offrir une victoire symbolique à la gauche sur l’imposition des plus fortunés. On est radicalement contre et c’est une sombre connerie mais il va bien falloir lâcher », plaide le député Renaissance Sylvain Maillard dans le Figaro.
Les socialistes sont dans le viseur. Sur France Info, mardi, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, n’a fermé aucune porte, hormis celle de participer au gouvernement. « On jugera au cas par cas », a-t-il défendu, tout en doutant que Sébastien Lecornu puisse « rompre avec la politique qui a été menée depuis huit ans », condition pour ne pas le censurer.
Mais il y a fort à parier que Sébastien Lecornu, l’un des macronistes les plus conservateurs, qui entretient des relations cordiales avec le Rassemblement national (RN), cherchera à donner des gages à l’extrême droite. Bien que décidé à pousser Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale, le RN n’exclut pas totalement les négociations. « On va écouter ce que Sébastien Lecornu a à proposer, sans beaucoup d’illusions toutefois », a résumé le député Sébastien Chenu.
Quoi qu’il arrive, le nouveau premier ministre est attendu au tournant, et les exigences – contradictoires – des partis ouverts au dialogue pourraient rapidement s’envoler. Si le gouvernement entend maintenir coûte que coûte ses politiques austéritaires, il semble en tout cas condamné.
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