«Ne rien faire, c’est laisser faire» : dans l’estuaire de la Loire, les habitants de Paimbœuf face à une délinquance banalisée

Des faits de délinquance qui se multiplient et des incivilités qui se banalisent. Le tableau aurait, il y a quelques années encore, paru pour le moins exotique à Paimbœuf, petite ville de 3000 habitants sise sur l’estuaire de la Loire, à une dizaine de kilomètres en amont de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Pour une partie des habitants de la commune, la situation est pourtant devenue intenable. Le week-end dernier, trois voitures ont été vandalisées et des bouteilles en verre ont été fracassées sur la chaussée par une bande, au cours d’une même soirée. Cela a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Dès le lendemain, dimanche 9 mars, un groupe de victimes de ces violences répétées et de riverains a pris l’initiative de constituer un collectif et de lancer une pétition en ligne pour lutter contre les incivilités et les délinquants. «Une ville où il fait bon vivre était notre objectif en nous installant sur la commune de Paimbœuf. Nous avons vite déchanté», observe le texte de la pétition. Intitulé «Ne rien faire, c’est laisser faire», cet appel à l’aide fait état de «vols, agressions, vandalismes, trafic de drogues, cambriolages, insultes», associée à «de la délinquance à n’en plus finir».

«À force, c’est presque normal»

En ligne, d’autres témoignages évoquent des faits qui se répètent à fréquence régulière. «À force, c’est presque normal», note une internaute qui, sur Facebook, affirme avoir déménagé du quartier concerné, où les troubles se répétaient «presque tous les jours». D’autres évoquent une situation qui ne date «pas d’aujourd’hui», font part d’un sentiment d’abandon ou mentionnent faire des rondes, pour veiller à l’ordre public.

«La situation s’est particulièrement dégradée depuis un an. Deux bandes rivales, de petits voyous, ont fait dégénérer la situation. Avant, nous avions affaire à des ivrognes qui urinaient sur nos poubelles. Maintenant, nous avons des délinquants qui fracassent tout sur leur passage, juste pour tuer le temps, ou qui cherchent à s’introduire chez les gens», témoigne au Figaro Marine Ferré, à l’origine de la pétition.

On pensait que faire profil bas suffirait à ne pas être victime de ces jeunes. Maintenant, on voit qu’il n’en est rien. Il est donc grand temps de reprendre notre ville

Marine Ferré, habitante de Paimbœuf

Installée à Paimbœuf depuis cinq ans, l’habitante ajoute avoir elle-même fait l’autruche, quelque temps, par peur de représailles. «On pensait que faire profil bas suffirait à ne pas être victime de ces jeunes. Maintenant, on voit qu’il n’en est rien. Il est donc grand temps de reprendre notre ville», ajoute la riveraine, qui espère échanger avec la municipalité pour mettre en place de la vidéoprotection, de l’éclairage de nuit ainsi qu’un meilleur accompagnement social des jeunes Paimblotins concernés. Une première réunion publique du collectif est prévue pour le 22 mars.

Sollicitée, la compagnie de gendarmerie de Pornic, chargé du secteur de Paimbœuf, confirme que la collectivité souffre en effet d’un taux de criminalité important rapporté à sa modeste population. «On y trouve une grande fragilité sociale liée à la désindustrialisation de la région, avec des mineurs de 14 à 18 ans en décrochage scolaire, et parfaitement désocialisés», note la gendarmerie. La géographie très urbanisée de Paimbœuf favoriserait, en outre, les troubles à l’ordre public et les nuisances nocturnes. Enfin, la pieuvre du narcotrafic a également pénétré la modeste agglomération. La semaine dernière, un réseau de trafic de stupéfiants de type «uber shit», en livraison à domicile, a été démantelé à Chaumes-en-Retz, à 20 kilomètres de la collectivité.

À rebours du sentiment d’inaction des autorités évoqué par les riverains mobilisés, la gendarmerie assure avoir renforcé ses patrouilles sur le secteur. Fermé depuis 2015, l’accueil du public a par ailleurs été rouvert à la brigade de gendarmerie locale, assurant ainsi une écoute et des services de proximité aux habitants de Paimbœuf, contraints jusqu’alors de se déplacer jusqu’à la brigade de Saint-Brévin-les-Pins en cas de problème. La mairie de Paimbœuf n’a pas donné suite aux sollicitations du Figaro. Une police municipale a néanmoins été fondée par la collectivité. Entré en service en novembre 2024, l’unique agent municipal fait son possible pour veiller au bien-être des plus de 3000 habitants de la commune.