Le recyclage du plastique, fausse bonne idée?

En cette période post-Jeux olympiques, un symbole fort demeure: les marques de Coca-Cola, distributeur exclusif de boissons pour l’événement, servies à partir de bouteilles en plastique dans des gobelets de même acabit. Et ce alors même que, conformément à l’objectif «Trajectoire zéro déchet et zéro plastique à usage unique» affiché par le Comité d’organisation, le groupe américain s’était engagé à installer 700 fontaines à boissons. Or ces dernières se sont faites rares, en dehors de la place de l’Hôtel-de-Ville de Paris… Et France Nature Environnement de crier au scandale.

Le plastique demeure un fléau dont on ne parvient pas à venir à bout. Depuis juillet dernier, l’Europe impose que les bouchons soient fixés aux bouteilles en PET. Initiative méritoire, mais les bouteilles ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan de plastique qui envahit la planète. Tout le monde a en tête les images effrayantes du vortex de déchets du Pacifique Nord ou des mammifères marins étouffés par des sacs en plastique. Mais ce matériau a des effets bien plus insidieux et méconnus, tant au stade de sa production que de tout son cycle de vie, non seulement sur le changement climatique mais également sur la santé.

Toxicité plus nette pour la santé des femmes

Et de plus en plus de voix de s’élever contre les mirages du recyclage, à l’instar de Rosalie Mann, fondatrice de la fondation No More Plastic, dans son livre éponyme (1), qui paraît aujourd’hui. Et ce ne sont pas les auteurs du livre La Civilisation du déchet (2) qui la contrediront. «Ce processus mondialisé de récupération et de recyclage ne peut aboutir qu’à un “décyclage”, c’est-à-dire une dévalorisation du produit initial», estiment les chercheurs Jérémie Cavé (IRD) et Yann Philippe Tastevin (CNRS). «Plus les matériaux usagés sont hétérogènes, moins il est possible d’obtenir un matériau recyclé de bonne qualité. », poursuivent-ils. Un pull en laine polaire finira incinéré et une brique de lait, en essuie-tout.

La plupart du temps, les plastiques recyclés sont encore plus toxiques qu’à l’origine

Rosalie Mann, fondatrice de la fondation No More Plastic

Rosalie Mann va plus loin: contrairement aux idées reçues, elle considère le recyclage comme un fléau pire que le mal. Car «la plupart du temps, les plastiques recyclés sont encore plus toxiques qu’à l’origine», autrement dit «un poison recyclé», tant les substances qu’ils contiennent et émettent sont néfastes pour la santé humaine, et ce de façon encore plus flagrante chez les femmes. Et d’égrener les études montrant le lien entre la production de ces produits pétroliers et les troubles du système immunitaire, l’augmentation des maladies chroniques comme le cancer, l’endométriose, la maladie de Crohn, le diabète, Alzheimer, la maladie de Parkinson, les maladies cardio-vasculaires ou encore l’infertilité.

Mustela supprime ses lingettes

Emmenés par le Rwanda et l’Europe, tous les pays du G7 affirment vouloir mettre fin à la pollution plastique dès 2040. Autant dire demain… Mais les négociations internationales autour du traité mondial sur le plastique, qui doivent se finaliser fin 2024, se heurtent au lobbying des pays pétroliers. Avec en ligne de mire la Conférence des Nations unies sur l’océan de Nice en juin 2025.

Alors, que faire? Le plastique le moins mauvais est celui qui n’existe pas. On ne peut dès lors que saluer les efforts de certaines entreprises qui vont dans la bonne direction, à l’instar de Mustela (Laboratoires Expanscience), qui a décidé de supprimer les lingettes de sa gamme d’ici 2027. De façon plus systémique: allonger la durée de vie des produits, proposer des substituts à ces derniers et développer la réutilisation et la consigne, encourager la production de plastique vraiment biodégradable. Au quotidien, il faut être pragmatique: «Manger des petits poissons peut réduire l’exposition aux polluants et à la pollution plastique», conseille par exemple Rosalie Mann. Anecdotique? Pas tant que ça. Du bon sens.

(1) «No More Plastic. Comment le plastique ruine notre santé», La Plage.(2) «La Civilisation du déchet, Tout savoir sur le recyclage et ses limites», Les Arènes.




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