Forum de Paris sur la Paix : « Sur la reconnaissance de l’État palestinien, la France craint-elle la réaction du gouvernement israélien ? », interroge Gershon Baskin

Ce vendredi s’ouvre le Forum de Paris sur la Paix au Conseil économique, social et environnemental (CESE). Ce sommet où vont intervenir de nombreuses personnalités de la société civile israélienne et palestinienne intervient alors que le gouvernement israélien a décidé de bombarder l’Iran, qu’une Conférence internationale sur le règlement pacifique de la question est coorganisée par Paris et Riyad, du 17 au 20 juin à l’Onu, pourrait déboucher sur une reconnaissance de l’État de Palestine.

Ce Forum doit lancer un appel de Paris pour la solution à deux États et porter l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza, le retour de tous les otages et une reprise de l’aide humanitaire paix et la sécurité au Moyen-Orient. Le Dr Gershon Baskin, chroniqueur et activiste pour la paix, va défendre au CESE, ce vendredi, la reconnaissance du « droit du peuple palestinien à vivre dans un État qui lui est propre, en paix et en sécurité ». Voici sa tribune.

« Bien sûr, et si ce n’est pas maintenant, alors quand ? La solution à deux États est sur la table depuis que les Nations unies ont décidé de partitionner la Palestine en 1947. Quarante-six ans plus tard, en 1993, le gouvernement israélien et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) ont signé la Déclaration de principes dans le cadre de ce qui est devenu connu sous le nom de processus de paix d’Oslo. Si la déclaration signée à l’époque ne mentionnait pas explicitement la solution à deux États ni la création d’un État palestinien voisin d’Israël, elle était plus qu’implicite dans ce processus. Le jour de la signature, l’OLP a reconnu « le droit de l’État d’Israël à exister en paix et en sécurité ».

Israël n’a pas rendu la légitimité qu’il a obtenue des représentants du peuple palestinien en reconnaissant le droit du peuple palestinien à vivre dans un État qui lui est propre, en paix et en sécurité. Mais depuis que le président palestinien Yasser Arafat a déclaré l’indépendance en novembre 1988, 147 pays ont reconnu l’État de Palestine. La France n’en fait pas partie. La France et de nombreux autres pays de l’OCDE n’ont toujours pas reconnu la Palestine, mais ils parlent de la solution à deux États, tout en ne reconnaissant qu’un seul d’entre eux. Ce genre de duplicité est une honte pour ces pays et rend un très mauvais service aux peuples d’Israël et de Palestine. La France a déclaré qu’elle reconnaîtrait l’État palestinien au moment opportun. Quand ce moment opportun arrivera-t-il ?

La France craint-elle la réaction du gouvernement israélien ? Le président Macron hésite-t-il à reconnaître l’État palestinien parce qu’Israël et certains membres de la communauté juive mondiale l’ont qualifié d’antisémite ? Il n’y a rien d’antisémite à reconnaître l’État palestinien, surtout dans le contexte du soutien à la solution à deux États. La France et les autres partisans de la solution à deux États devraient à juste titre appeler les 193 États membres de l’ONU qui n’ont pas encore reconnu Israël ou la Palestine à le faire et déclarer que les deux États ont le droit de vivre en paix et en sécurité. Les pays comme la France qui soutiennent ouvertement et matériellement le droit d’Israël à se défendre doivent également comprendre qu’Israël ne connaîtra jamais la sécurité si le peuple palestinien ne jouit pas lui aussi de la liberté, de la libération, de l’indépendance et de la sécurité. Le peuple palestinien lui-même doit également reconnaître cette équation : il n’aura jamais la liberté, la libération, l’indépendance et la sécurité si Israël n’a pas la sécurité.

En réalité, si la France reconnaît la Palestine avec tous les États membres de l’ONU à l’exception d’Israël, la vie des Palestiniens ne changera pas. Essentiellement, les Palestiniens ont seulement besoin qu’Israël reconnaisse l’État de Palestine pour que l’occupation prenne fin et qu’ils obtiennent leur indépendance. Mais comment cela va-t-il se produire ? Cela pourrait se produire si de nouveaux dirigeants en Israël et en Palestine commençaient à se tourner vers l’avenir et non plus uniquement vers le passé. Cela pourrait se produire, même si cela ne semble pas être le cas pour l’instant. Le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à un État ne devrait même pas être négociable. Cela doit être un fait accompli lorsque les dirigeants des deux parties retourneront à la table des négociations. Les frontières peuvent être négociées. Les relations économiques peuvent être négociées. Les modalités du partage de Jérusalem peuvent être négociées. Mais le droit du peuple palestinien à un État ne devrait pas être négociable – il devrait être le point de départ de ces négociations.

Certaines personnes affirment que reconnaître la Palestine aujourd’hui reviendrait à récompenser le Hamas. C’est l’une des déclarations les plus absurdes qui aient jamais été faites. Le Hamas existait et a agi comme il l’a fait le 7 octobre parce qu’il s’opposait à la solution à deux États. L’objectif ultime du Hamas était l’effacement d’Israël. Soutenir la reconnaissance de la Palestine dans le cadre du soutien à la solution à deux États est une récompense pour tous les Palestiniens et les Israéliens qui ont travaillé pendant des années pour que la solution à deux États devienne une réalité. Rejetons donc les déclarations ridicules qui sont déconnectées de la réalité.

Une autre déclaration de ce type est « de la rivière à la mer, la Palestine sera libre ». Il s’agit d’une déclaration anti-palestinienne faite par des personnes irresponsables qui appellent à la destruction d’Israël et à l’expulsion de sept millions de Juifs de leur foyer. Cette déclaration est contraire à la paix et à la solution à deux États. La déclaration que nous devrions tous adopter est la suivante : « De la rivière à la mer, nous sommes d’accord sur deux États ! ». Il s’agit d’une déclaration pro-israélienne et pro-palestinienne. »

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