Cyclisme : sécurité, spectacle… Quelles conséquences après l'ajout d’une 23e équipe dans le peloton sur les Grands Tours ?

Une équipe supplémentaire pour jouer des coudes dans le peloton. L'Union cycliste internationale (UCI) a officialisé, lundi 31 mars, la présence d'une 23e équipe au départ des trois Grands Tours masculins (Tour de France, Tour d'Italie et Tour d'Espagne) au calendrier. "Les organisateurs pourront donc attribuer trois wild cards", précise le communiqué de l'UCI. Dès le mois de mai et le départ du Giro donné en Albanie, le peloton va donc passer de 176 à 184 coureurs. "La première motivation de passer à 23 est de faire en sorte que des équipes qui ont un vrai projet puissent grandir", avait expliqué le patron du Tour, Christian Prudhomme, à l'AFP juste avant le vote.

Une annonce attendue et bien accueillie par Yoann Offredo, ancien coureur (quatre départs de Grands Tours) et consultant franceinfo: sport : "On se rend compte que le système économique du cyclisme dans son ensemble n'est quand même pas très pérenne. On a un peloton d'équipes très hétérogènes : certaines ont beaucoup d'argent, certaines peinent à exister, explique-t-il. Le Tour de France et les Grands Tours de manière générale, c'est la plus grande vitrine, et quand on veut attirer des sponsors, il faut y participer. Si on n'y est pas, c'est difficile d'aller les démarcher et de leur demander d'investir des millions dans l'équipe sans avoir l'assurance d'être visible sur un Grand Tour."

Valoriser les équipes nationales et de deuxième division

Cette place supplémentaire pourrait ainsi profiter à des équipes qui se sont renforcées à l’intersaison avec un recrutement ambitieux, à l’image de la formation suisse Tudor, avec Julian Alaphilippe, ou Q36.5, avec Tom Pidcock. "Les équipes dont on parle comportent des coureurs de grande qualité, qui ne pourront peut-être pas gagner le général, mais dynamiter les étapes, les rendre plus intéressantes", espère Yoann Offredo. 

Un système qui n'empêchera pas les organisateurs de continuer à inviter des formations nationales : "Une formation comme TotalEnergies qui ne serait pas sur le Tour de France, ça serait, je pense, la fin de l'équipe de Jean-René Bernaudeau, lui qui œuvre dans le cyclisme depuis plusieurs décennies", illustre l’ancien coureur. "C’est vrai aussi qu'il y a une volonté des Italiens, des Espagnols, des Français, de défendre leur cyclisme national", avait reconnu Christian Prudhomme à l’AFP.

La présence d’une équipe de plus peut aussi participer à redessiner le spectacle dans le peloton, avec des coureurs un peu plus enclins à se montrer. "Les équipes invitées ont presque un devoir de reconnaissance en étant conviées sur un Grand Tour. On doit montrer le maillot", explique Yoann Offredo. Il prend l’exemple de sa première participation au Tour avec l’équipe Wanty en 2017 : "On était tout le temps devant. Alors, est-ce qu'on a été acteurs ? Oui et non, parce qu'on n'a pas gagné d'étapes, mais ça a été un premier pas pour la suite. Désormais, l'équipe Intermarché-Wanty est en World Tour, et en plus de ça, elle a remporté le maillot vert avec Biniam Girmay. Donc c'est un accélérateur pour attirer des sponsors."

Des interrogations sur la sécurité

L’annonce a cependant suscité de nombreux débats sur le plan de la sécurité, l’un des thèmes qui a le plus fait parler depuis le début de la saison, d’autant plus que la décision avait été prise, en 2018, de réduire le nombre de coureurs par équipes de neuf à huit. A l'époque, l'UCI affirmait que cette décision "contribuerait aux efforts consentis pour assurer la sécurité du peloton et du reste de la caravane de la course". "On a besoin de plus de sécurité dans le peloton et là on nous dit qu'on ajouterait huit coureurs, je trouve ça étonnant", a d'ailleurs fait remarquer Richard Plugge, le patron de l’équipe Visma- Lease a Bike, au média flamand Sporza.

Pour Yoann Offredo, "huit coureurs supplémentaires dans un peloton, ce n'est pas plus de risques". "Il faudrait certainement réglementer davantage d'autres problèmes", ajoute-t-il, citant par exemple "les vélos qui vont de plus en plus vite" et la "limitation possible des braquets", mais aussi "les aménagements urbains". Pour lui, les huit coureurs seront "des professionnels, de haut niveau, ça ne va pas changer beaucoup de choses". Rendez-vous au départ du Giro, le 9 mai, pour connaître les premiers effets de cette modification au sein du peloton.