«Il n'est pas dit que la réforme sera abrogée» : Éric Ciotti contredit le RN sur les retraites

Un épais brouillard s’est invité sur l’alliance que le président des Républicains Éric Ciotti a conclue avec le Rassemblement national, en vue des législatives du 30 juin et 7 juillet prochains. Quid de la réforme des retraites adoptée en 2023, qui repoussait l’âge légal de départ à 64 ans, si la coalition du «camp national» remportait ce scrutin anticipé ? Lors des débats qui ont agité le pays il y a un an et demi, les positions étaient pour le moins irréconciliables. Si le parti à la flamme était partisan d'un seuil allant de 60 à 62 ans selon le nombre de trimestre cotisés, une majorité des lieutenants LR, eux, dénonçaient un aggiornamento trop modéré. Et prônait un départ à 65 ans.

Comment gouverner avec une telle différence idéologique ? Invité du «20 heures» de France 2 lundi soir, le député des Alpes-Maritimes a affirmé qu’«il n’est pas dit que la réforme des retraites sera abrogée.» «Il y a une interrogation sur les carrières longues, pour ceux qui ont commencé très tôt», a-t-il fait encore valoir. Après un premier temps dédié «l’urgence», l’alliance, hypothétiquement victorieuse, verra si «elle a des marges de manœuvre données par un audit sur la vérité des comptes.» Alors qu’une petite musique laissait entendre que les lepénistes abandonneraient l’abrogation promise, une fois arrivés au pouvoir, le patron du RN a fait une mise au point.

«Le temps des réformes»

Dans une interview au Parisien , Jordan Bardella, qui lorgne Matignon, révèle à quoi ressembleraient les premiers mois de son action. Lorsque s’ouvrira le deuxième temps, celui «des réformes», celle des retraites sera bel et bien «abrogée parce qu'elle est inefficace économiquement et injuste socialement.» «Nous permettrons aux carrières longues, ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans, de partir à la retraite avec 40 annuités à un âge légal de départ de 60 ans», détaille-t-il.

Un peu plus tôt, le député sortant RN de la Somme Jean-Philippe Tanguy avait justifié ce calendrier en deux temps pour ne pas «mettre la pagaille» pendant les Jeux olympiques. Une manière de donner une temporalité, après la temporisation de son chef de file Jordan Bardella qui avait jugé cette question «importante» sans être «urgente» la semaine dernière sur France 2. Et de ne pas perdre des électeurs, sensibles à la question sociale, d’ici deux semaines. Une divergence majeure entre les présidents du RN et de LR, qui peut donner du grain à moudre aux oppositions.

Lors de sa conférence de presse mercredi 11 juin, le président de la République avait fait preuve d’ironie. «Monsieur Ciotti voulait aller plus loin encore sur le texte sur les retraites, tandis que Monsieur Bardella défendait 62 ans... Quelle est la cohérence qui unit ces gens pour gouverner?», avait pourfendu le chef de l’État, selon qui le patron de la droite avait fait «un pacte du diable».