François Bayrou relance le débat autour du chiffrage des retraites

Le 14 janvier 2025, pendant son discours de politique générale, le Premier ministre a parlé de 45 à 55 milliards d'euros de déficit des retraites, bien plus que les chiffrages du Cor, le Conseil d'orientation des retraites. Dans son dernier rapport, l'organisme anticipait plutôt un déficit autour de 14 milliards d'euros à horizon 2030.

Une telle différence s'explique par le fait que le Cor ne tient pas compte des subventions d'équilibre versées par les collectivités publiques, et l'État. Or, chaque année, comme les cotisations patronales et salariales et les impôts, ne suffisent pas pour payer les pensions des 17 millions de retraités, et notamment celles des régimes spéciaux et des fonctionnaires, l’État compense.

Pour des économistes libéraux, comme l’ancien inspecteur des finances Jean-Pascal Beaufret, ou l'Institut Molinari, sans ces subventions d’équilibre, le diagnostic est forcément tronqué. Pour d’autres, mélanger le financement des retraites du privé et du public dans un grand tout revient à mélanger des choux et des carottes et ce n’est pas juste. Par exemple, pour que le régime du public soit à l’équilibre, il suffirait d’embaucher des agents publics. Ce sont, donc, deux façons de présenter les choses et des sources de beaucoup de controverses.

L'État doit emprunter et demande l'avis de la Cour des comptes

De plus, l’État doit emprunter, car il n’a pas les moyens de payer. Cependant, selon François Bayrou, compte tenu de ce déséquilibre bien plus élevé, l’effort à fournir est bien plus important. Sur les plus de 1 000 milliards de dette supplémentaires accumulés par le pays ces dix dernières années, les retraites représentent 50% du total. Il s'agit aussi d'un argument politique, puisqu'en présentant ainsi les choses, le Premier ministre espère que les Français prendront conscience de l’impossibilité de revenir sur une réforme Macron qu’il juge vitale pour le pays. 

François Bayrou se tourne, donc, vers la Cour des comptes en commandant une mission flash, pour faire la lumière sur le financement réel des régimes et trancher. Il le fait d’autant plus facilement que ces dernières années, les rapports du Conseil d’orientation des retraites ont souvent été critiqués, jugés pas toujours fiables, avec des scénarios de croissance et de démographie trop optimistes.

Il ne faut pas oublier aussi, que les partenaires sociaux siègent au Cor et comme François Bayrou va leur demander de négocier sur ce sujet sensible, il veut éviter de les mettre dans une position de juges et parties. À la Cour des comptes, le diagnostic sera fait par des magistrats indépendants et l’institution de Pierre Moscovici fera office de juge de paix.