« Une nouvelle histoire débute. » C’est par ces mots, dans un communiqué publié le 19 décembre 2022, qu’Eagle Football annonçait son rachat d’OL Groupe, la société holding de l’Olympique lyonnais (OL). Moins de deux ans et demi après, l’histoire tourne au cauchemar. Dans le rouge financièrement depuis des mois, l’OL, qui se déplace ce samedi 10 mai à Monaco pour tenter de rester dans la course à la qualification à la juteuse Ligue des champions, est devenu le symbole de la financiarisation du ballon rond qui mène des clubs à leur perte.
Sanctionné à la mi-novembre par la Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG), le gendarme financier du foot français, l’OL s’est vu imposer un encadrement de sa masse salariale, une interdiction de recruter et une rétrogradation en Ligue 2 à titre conservatoire à l’issue de la saison, si son président John Textor ne redresse pas ses comptes.
Plus de 540 millions de dettes
Endetté à hauteur de 463,8 millions au 30 juin 2024, Eagle Football Group, l’entité à la tête de l’OL et du Groupama Stadium, a vu son endettement financier net de trésorerie (créances et dette joueurs comprises) passer à 540,7 millions d’euros au 31 décembre 2024, selon la publication de ses comptes fin mars. Pour amadouer la DNCG il y a six mois, l’homme d’affaires américain a alors promis un refinancement mais l’argent tarde à venir.
Parmi les solutions proposées, John Textor s’est engagé à introduire Eagle Football Holdings à la Bourse de New York pour le premier semestre 2025. Mais l’opération, qui doit rapporter 150 millions d’euros, n’a toujours pas été réalisée. Même chose pour la vente des parts d’Eagle dans le club anglais de Crystal Palace, actuellement 12e de Premier League, dont 40 millions d’euros doivent être destinés à l’OL. Selon RMC Sport, Eagle Football Holdings, qui chapeaute ses clubs de football (Botafogo au Brésil, l’OL, Molenbeek en Belgique) serait frappée d’un premier avis de radiation du registre britannique du commerce et des sociétés pour ne pas avoir rendu public ses comptes depuis juin 2024.
Pour se donner un peu d’air, Eagle et ses actionnaires ont apporté 83 millions d’euros en trésorerie tandis que les transferts du mercato d’hiver ont permis de récolter 60 millions d’euros de recettes et d’alléger la masse salariale. Par ailleurs, un plan de sauvegarde de l’emploi et de départs volontaires lancé à l’automne est sur le point d’être finalisé, selon le club. Mais en ayant écarté en quelques mois son directeur sportif (David Friio), son entraîneur (Pierre Sage) et son directeur général (Laurent Prud’homme), John Textor doit aussi mettre la main à la poche…
Endetté auprès d’Ares, un fonds d’investissement américain basé à Los Angeles qui lui a avancé l’argent pour l’achat d’OL Group, l’homme d’affaires pourrait selon certaines rumeurs être écarté d’Eagle Group Holdings par le mastodonte qui commence à s’impatienter. Quoi qu’il arrive, le club devra vendre ses joueurs à forte valeur marchande comme Corentin Tolisso ou encore Rayan Cherki.
Une fin de saison décisive
Sportivement, l’OL a aussi fait miroiter à la DNCG une possible qualification à la très rémunératrice Ligue des champions à l’issue de la saison, pouvant lui rapporter au moins 50 millions d’euros. Mais à deux matchs du terme en étant 7e de Ligue 1 avec 54 points, à cinq longueurs de Marseille (2e, 59 points) et à 4 de Monaco (3e, 58 points), Lyon n’est plus maître de son destin pour retrouver la C1, qu’il n’a plus disputée depuis 2020.
Depuis son incroyable élimination (5-4) face à Manchester United en quarts de finale retour, le 17 avril, après avoir mené de deux buts en prolongations, l’OL a du mal à se remettre. Battus 2-1 lors du derby par Saint-Étienne, qui lutte pour ne pas descendre en L2, puis par Lens, les Gones peuvent se raccrocher à l’espoir de la 4e place qui permet une qualification pour la C1 avec des barrages. Mais Nice (4e, 57 points) est la mieux placée, grâce à une meilleure différence de buts sur Lille (5e, 57 points) et Strasbourg (6e, 57 points). Or ces trois clubs possèdent trois points d’avance sur l’OL…
Pour ne rien arranger, le journal l’Équipe a révélé, ce jeudi, que l’UEFA, très inquiète de la situation financière de Lyon, a proposé au club un « accord négocié » afin de lui éviter une exclusion des compétitions européennes la saison prochaine. Par cette conciliation, la commission de contrôle financier des clubs infligerait à l’OL une amende de plus de 10 millions d’euros, accompagnée d’un plan de retour à l’équilibre avec un encadrement de sa masse salariale et un contrôle de ses transferts. L’OL est loin d’être sortie d’affaire…
Avant de partir, une dernière chose…
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