Guerre à Gaza : quelles sanctions les pays européens envisagent-ils contre Israël ?

Gaza est devenu "un mouroir, pour ne pas dire un cimetière", a dénoncé mardi 20 mai sur France Inter Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, alors que l'armée israélienne intensifie son offensive militaire dans l'enclave palestinienne et limite très fortement l'aide humanitaire. Face au plan israélien, la France et d'autres pays européens haussent le ton vis à vis d'Israël, au moins diplomatiquement.

C'est la première fois au sein de l'Union européenne, via la France et les Pays-Bas, que l'on évoque la suspension de l'accord d'association avec Israël entré en vigueur en juin 2000, sur la base de son article 2 qui conditionne toutes ses clauses au respect des droits de l'Homme. Le débat est donc désormais ouvert. L'année dernière, le Conseil de l'UE avait imposé des sanctions à l'encontre de quatre colons juifs et deux organisations qualifiées d'extrémistes, opérant en Cisjordanie occupée et qui sont responsables d'exactions contre des civils palestiniens.

Compte tenu de son importance, l'UE dispose d'un moyen de pression énorme sur l'Etat hébreu : elle est le premier partenaire commercial d'Israël. En 2022, près d'un quart des exportations israéliennes était dirigé vers l'Europe, tandis que 31% des importations provenaient de l'Union européenne, selon un rapport français du Trésor.

Les Etats membres peuvent aussi agir, eux-mêmes, sur leur relation bilatérale avec Tel Aviv en suspendant, par exemple, certaines coopérations militaire, agricole ou scientifique. Ils commencent à craindre de devenir complices des crimes de guerre d'Israël à Gaza et d'être peut-être traînés, un jour, devant la justice internationale.

Réticences et tabous pour certains pays

L'Union européenne n'a aucun frein pour sanctionner la Russie de Vladimir Poutine ou l'Iran de l'ayatollah Khamenei mais pour Israël, le dossier est très sensible. Face à la pression qui augmente, d'énormes réticences, voire des tabous, bloquent d'éventuelles sanctions contre Israël. C'est une démocratie, dont l'histoire pèse lourd. Résultat : les Européens se montrent divisés.

Le passé de l'Allemagne l'empêche de sanctionner réellement l'Etat hébreu, tout comme la Hongrie de Viktor Orban. Elle a même accueilli le mois dernier, en grande pompe, Benjamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, alors que celui-ci est sous le coup d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale.

En revanche, d'autres pays comme l'Irlande ou l'Espagne, qui ont reconnu officiellement l'Etat de Palestine, sont en première ligne pour faire pression sur Israël et militent pour des actions de rétorsion. Dans cette impasse politique et face à l'ampleur de la tragédie palestienne, la France est en train de faire évoluer sa position, à tel point, qu'elle pose désormais sur la table la reconnaissance de la Palestine.