Frappes américaines en Iran : "On est dans l'escalade de l'inutile et de la dangerosité", s'inquiète le spécialiste des relations internationales Bertrand Badie
Pour le spécialiste des relations internationales à Sciences Po, Bertrand Badie, les frappes américaines sur trois des principaux sites nucléaires iraniens sont une démonstration du fait que Donald Trump veut replacer les États-Unis au "centre du jeu". "Le principe exclusif de la diplomatie trumpienne est de montrer que, quelle que soit l’option, elle ne peut pas se réaliser sans les États-Unis", assure-t-il.
Selon lui, en bombardant les sites stratégiques du programme nucléaire iranien de Natanz, Ispahan et Fordo, les États-Unis ont pris le risque d'"humilier" l'Iran. "Plus l'Iran sera humilié par cet épisode et plus sa volonté d'apparaître comme une puissance régionale potentiellement nucléaire sera déterminante", souligne-t-il. "Vous pouvez porter des coups extrêmement forts au programme nucléaire mais celui-ci dépend d'abord de la volonté politique de ceux qui le mènent", rappelle Bertrand Badie. "Il suffit qu'il y ait une réaffirmation de la volonté politique iranienne pour que tout recommence, avec plus de rage, plus d'obstination, plus de provocation qu'avant, c'est la raison pour laquelle on est là, dans l'escalade de l'inutile et de la dangerosité", s'inquiète-t-il.
Donald Trump a déclaré après les bombardements américains que "les installations essentielles d'enrichissement nucléaire de l'Iran ont été intégralement et totalement détruites". "La grande idée de l'Iran, c'est d'exister comme puissance régionale au Moyen-Orient où il y a un monopole de l'arme nucléaire par Israël", assure Bertrand Badie. Si l'Iran dément toujours vouloir se doter de l'arme atomique et défend son droit à un programme nucléaire civil, Israël maintient l'ambiguïté sur sa possession d'une telle arme. L'État hébreu détient 90 ogives nucléaires, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm.
Pour le spécialiste, "il y aura une riposte militaire, c'est évident, sinon l'Iran perd la face". Il avance que "la stratégie victimaire" de Téhéran, apparaissant comme "victime d'une violation du droit international" à la suite des frappes israéliennes et américaines, peut constituer un atout pour le régime iranien.