«C’est le livre d’un patriote, voilà tout», résume Romain Marleix, évoquant le livre posthume de son frère, Olivier. Le manuscrit fut bouclé l’avant-veille du décès de ce dernier. Olivier Marleix écrivait quasi secrètement «Dissolution française», que publient en cette mi-novembre les éditions Robert Laffont. Le défunt gaulliste y égrène les trahisons morales et politiques dont il fut un spectateur avisé. D’abord comme président de la commission d’enquête sur la vente de fleurons comme Alcatel, Alstom ou STX, puis comme chef de file des députés Les Républicains à l’Assemblée nationale. Dans «Points de Vue» (Le Figaro TV), Romain, de quatorze ans le cadet d’Olivier, entretient le souvenir d’un frère qui «aimait les Français et se sentait à l’aise dans une tour HLM à Dreux comme au fin fond d’un Cantal ou dans un dîner mondain à Paris».
Pour Olivier (Marleix), Emmanuel Macron incarnait à la fois la tentation supranationale et le coup d’État technocratique
Romain Marleix, frère d’Olivier Marleix
Fils de l’ancien ministre Alain Marleix qui lui transmit «l’amour de la France, une intransigeance dans les convictions et le fait de ne jamais être un héritier», «Olivier, car on n’appelle son frère que par son prénom, avait en horreur la tentation supranationale qui sous-tend l’idée selon laquelle la France ne serait pas assez grande, que nous n’aurions pas les moyens d’avoir une industrie forte et autonome», rapporte Romain Marleix. Par ailleurs, l’ancien maire d’Anet (Eure-et-Loir) voyait poindre depuis quelques années «le coup d’État technocratique» de «nombreux hauts fonctionnaires qui, pour accélérer leur carrière, ont vampirisé des postes à responsabilité où ils font régner une chape de plomb sur les autres responsables politiques, laissant croire qu’il n’y a aucune alternative hormis eux-mêmes». Aux yeux d’Olivier Marleix, Emmanuel Macron incarnait «ces deux dérives» : supranationale et technocratique.
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Passer la publicitéPartisan du «Non» à Maastricht avec les souverainistes du RPR , Olivier Marleix est intraitable avec la classe politique actuelle, lui qui a «commencé en politique avec Maurice Couve de Murville, Pierre Messmer, Charles Pasqua ou l’amiral Philippe de Gaulle. On le croit dur avec ses contemporains mais c’est très difficile de maintenir ce niveau d’excellence», ne peut s’empêcher de constater Romain Marleix. Est-ce à dire que certaines convictions gaullistes se seraient perdues au fil du temps ? Le frère d’Olivier Marleix veut le croire, rappelant combien le député d’Eure-et-Loir fut parfois bien seul au front sur les sujets de souveraineté. Peu étaient à ses côtés publiquement lorsqu’il alertait, par exemple, sur le même plateau du Figaro TV, quant au risque de démantèlement d’Atos.
«Même chez Les Républicains, ça n’a pas toujours été facile pour lui de défendre la souveraineté française. Il est difficile de faire entendre une voix exigeante sur l’indépendance nationale, car même si beaucoup d’élus partagent cette conviction, personne n’ose aller au bout de cette idée-là», raconte Romain Marleix. «Nous avions l’impression que si nous n’étions pas parfaitement alignés avec l’idéologie européiste ou avec celle du libre-échange, nous n’étions pas sérieux. On voit aujourd’hui sur le Mercosur que les choses semblent avoir changé chez LR», relativise toutefois le frère cadet d’Olivier Marleix.
Celui qui a été remplacé par Laurent Wauquiez à la tête du groupe LR au Palais Bourbon n’a eu de cesse de regretter que «la droite gaulliste en France soit aujourd’hui écrasée entre les centristes d’aujourd’hui et le Rassemblement national, tandis que le macronisme s’affaire à détruire la droite républicaine». Tout au long du livre, Olivier Marleix n’a pas de mots assez durs envers les jeux de dupes politiciens occultant les prémices d’une profonde crise de régime, comparable selon lui à la Révolution française. Avec deux détonateurs : «le discrédit qui frappe les élites et la question de la fiscalité qui, dans l’Histoire», a toujours allumé la mèche, rappelle Romain Marleix. Lequel raconte que son frère «avait un mantra : «Chacun est nécessaire». Ça résonne tout particulièrement après huit années de macronisme où l’on a insulté les Français qui ne seraient rien ou n’auraient qu’à traverser la rue pour trouver du travail».
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S’il ne fallait retenir qu’un combat parmi les mille et un engagements d’Olivier Marleix ? «C’est l’indépendance de la France. Je crois que ça lui irait très très bien», ponctue, ému, Romain Marleix.