La protestation contre la guerre à Gaza s’intensifie en Israël

Tel Aviv (Israël), correspondance particulière.

Des manifestations sur tous les campus universitaires pour protester contre la guerre à Gaza et le massacre se sont déroulées, mardi 27 mai, à l’initiative de Drapeau noir, un mouvement créé par un groupe d’enseignants qui demandent aux dirigeants des universités et aux organisations du corps enseignant de prendre des mesures concrètes pour mettre fin à la guerre.

« Il s’agit d’une première action contre le déni et le soutien tacite des crimes commis en notre nom », ont déclaré ces enseignants. La semaine dernière, déjà, plus de 1 350 d’entre eux avaient signé une pétition en ligne contre les meurtres et les crimes de guerre dans la bande de Gaza, à l’initiative de Drapeau noir.

Dénoncer le « silence »

La pétition, qui continue de circuler, affirme que « les établissements d’enseignement supérieur en Israël jouent un rôle central dans la lutte contre le coup d’État. C’est précisément dans ce contexte que leur silence face aux meurtres, à la famine et à la destruction à Gaza, ainsi qu’à la destruction totale du système éducatif, de son personnel et de ses infrastructures, est particulièrement frappant ».

Les signataires qualifient la reprise des combats dans la bande de Gaza de « série effroyable de crimes de guerre et même de crimes contre l’humanité, tous commis de nos mains », qui « finiront par détruire l’enseignement supérieur en Israël et la société tout entière de l’intérieur ».

Le Comité de lutte académique pour la démocratie, créé il y a environ trois ans par des professeurs d’enseignement supérieur, a également organisé la semaine dernière une série de manifestations dans les universités pour exiger « la fin de la guerre, le retour des otages et la fin des meurtres d’innocents ». Les manifestations ont eu lieu dans les universités de Tel Aviv, Ben Gourion, Bar Ilan, Haïfa et à l’Institut Weizmann de Rehovot.

58 minutes pour la libération des otages

Dans le même temps, l’Union nationale des étudiants, en collaboration avec les associations des campus, a organisé pour la première fois une journée de protestation nationale, mercredi 28 mai, pour marquer les 600 jours de captivité des otages à Gaza. Sur les campus à travers le pays, les cours ont été interrompus pendant une heure : un rassemblement de 58 minutes, en référence au nombre de personnes enlevées qui ne sont toujours pas rentrées chez elles.

La journée a débuté par des rassemblements à midi dans tous les établissements d’enseignement supérieur, puis s’est poursuivie par une marche partie de l’université Reichman. Le soir, des jeunes et des étudiants de tout le pays se sont rassemblés à la gare centrale de Tel-Aviv et sur des places de la ville. Samedi prochain, un rassemblement contre l’occupation et la guerre aura lieu à Haïfa, à l’initiative de la coalition « Partenariat pour la paix », qui regroupe des dizaines d’organisations et d’associations, dont le Front démocratique pour la paix et l’égalité (Hadash) et le Parti communiste israélien.

Les manifestations contre la guerre ont commencé immédiatement après l’attentat criminel perpétré par le Hamas dans des localités israéliennes le 7 octobre 2023, qui a fait plus de 1 200 victimes. Les petites manifestations, réprimées avec une violence extrême par les forces de police, avaient pour but de défendre le droit de manifester contre la guerre. Plus les crimes de guerre commis par Israël dans la bande de Gaza s’intensifiaient, atteignant leur paroxysme ces derniers jours avec plus de 54 000 Palestiniens tués, dont une majorité de femmes et d’enfants, plus les manifestations s’amplifiaient… et plus la répression policière augmentait.

Les manifestations contre la guerre et les crimes contre l’humanité prennent une nouvelle dimension depuis deux mois. Seuls le Parti communiste et Hadash leur apportent un soutien actif dans la rue et au Parlement. Le « Partenariat pour la paix », créée par Hadash afin de rassembler des dizaines d’organisations et de mouvements pour la paix, les droits humains et l’égalité, est devenu au cours de l’année écoulée un acteur central des manifestations dans les rues juives et arabes.

Violences policières et mots interdits

Mais tout cela se fait dans des conditions très difficiles. La majorité de la population israélienne n’est pas exposée aux images des massacres dans la bande de Gaza. Les menaces d’une « nouvelle Nakba » sont proférées ouvertement par les ministres racistes du gouvernement de droite, à l’encontre des Palestiniens dans les territoires occupés comme des citoyens arabes d’Israël.

Dans « la seule démocratie du Moyen-Orient », la police interdit de brandir des drapeaux palestiniens, des photos d’enfants palestiniens victimes des bombardements ; les mots « famine », « crimes contre l’humanité », « crime de guerre », « État palestinien » et bien d’autres encore sont prohibés, bien qu’aucune loi israélienne ne les proscrive.

Toute personne arborant des pancartes contre la guerre, une photo d’un enfant de Gaza ou un drapeau palestinien s’expose à une arrestation ou à des coups, et souvent aux deux. Cependant, aucune sanction n’est prévue lorsque des milliers de personnes crient « mort aux Arabes » ou frappent des habitants palestiniens dans la vieille ville de Jérusalem-est sous occupation israélienne, comme cela a été le cas lors de la « Marche des drapeaux », qui s’est déroulée en début de semaine.

Malgré les difficultés, une partie croissante de la population israélienne, juive et arabe, estime qu’il est temps de mettre fin à la guerre : elle atteint désormais les 60 %, comme l’ont montré les sondages du mois dernier. Les rangs des manifestants dans les rues grossissent, tout comme la demande de libération des otages (le slogan du Hadash est « Tous contre tous », tous les otages contre tous les prisonniers et détenus palestiniens en Israël, NDLR), de renversement du gouvernement de Netanyahou et de fin de la guerre.

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