La Commission européenne n’a pas justifié de manière satisfaisante et plausible son refus de communiquer des messages échangés en pleine période Covid entre sa présidente Ursula von der Leyen et le PDG de Pfizer Albert Bourla, a tranché ce mercredi 14 mai au matin par le Tribunal de l’Union Européenne à Luxembourg. Le volet concerne la plainte de Matina Stevis. Cette journaliste du New York Times avait révélé en avril 2021 l’existence d’échanges numériques, dont le contenu est toujours resté secret.
Ainsi, les textos avaient été échangés au moment où le laboratoire Pfizer/BioNTech était le plus gros fournisseur de vaccins anti-Covid de l’Union européenne : les contrats négociés par la Commission au nom des Vingt-Sept se chiffraient en milliards d’euros.
Cela a valu à Ursula von der Leyen d’être la cible de plusieurs plaintes, dont l’une au pénal en Belgique pour « destruction de documents publics » et « corruption », à laquelle étaient associées la Pologne et la Hongrie. Cette plainte a été déclarée irrecevable en janvier par la cour d’appel de Liège.
La Commission avait refusé de dévoiler les messages
Un an après avoir révélé l’existence des textos échangés entre Ursula von der Leyen et le PDG de Pfizer Albert Bourla entre le 1er janvier 2021 et le 11 mai 2022, la journaliste avait ensuite souhaité l’année suivante se voir communiquer l’ensemble des messages. Une demande menée au titre de la possibilité légale d’accéder à des documents publics de l’UE, en vertu d’un règlement européen de 2001. Le refus opposé par la Commission a poussé la journaliste à saisir la justice européenne, avec le soutien de son journal.
« La Commission a rejeté la demande au motif qu’elle ne détenait pas les documents visés par celle-ci. Mme Stevis et The New York Times ont demandé au Tribunal de l’Union européenne d’annuler la décision de la Commission », rappelle le tribunal. Pour justifier son refus, l’exécutif européen a affirmé être incapable de produire ces textos. Ils n’ont pas été enregistrés et archivés en tant que documents publics, « faute de contenu substantiel, a expliqué un de ses responsables, lundi 12 mai, devant la presse. Les SMS ne sont pas systématiquement considérés comme des documents publics ».
« La Commission européenne n’a jamais nié qu’il y avait eu des interactions »
L’audience de plaidoiries avait donné lieu, le 15 novembre 2024, à des échanges animés entre les deux parties à Luxembourg. Bondine Kloostra, avocate du New York Times, avait accusé la Commission d’avoir « violé les principes de bonne administration et de communication » en négligeant l’importance de ces SMS.
En face, Paolo Stancanelli, juriste chargé de défendre la Commission, avait plaidé que les textos échangés n’entraient en aucun cas dans le cadre d’une négociation sur les conditions d’achat des vaccins. En outre, les services de la Commission, sollicités pour retrouver ces échanges en 2022, s’étaient adressés au cabinet d’Ursula von der Leyen, qui s’était dit « incapable » de les retrouver. « La Commission européenne n’a jamais nié qu’il y avait eu des interactions entre Ursula von der Leyen et Albert Bourla. Il manque le lien entre ces textos et la discussion sur les accords portant sur les vaccins », a insisté le juriste.
L’affaire a suscité une controverse au sein même des institutions bruxelloises. La médiatrice de l’UE, à l’époque l’Irlandaise Emily O’Reilly, avait demandé début 2022 au cabinet d’Ursula von der Leyen de s’efforcer de mettre la main sur les SMS. « Il est clair (qu’ils) entrent dans le cadre de la législation européenne sur l’accès du public aux documents » et « le public peut y avoir accès s’ils concernent le travail de l’institution », avait-elle estimé, parlant d’un dossier « problématique ». En janvier 2022, par la voix d’un porte-parole, la Commission avait indiqué envisager une mise à jour de sa politique d’accès aux documents, sans plus de précisions.
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