Boire des jus de fruit est plus mauvais pour le cœur que manger des friandises
Une étude suédoise démontre que toutes les sources de sucre n’ont pas le même impact sur le risque de maladie cardiovasculaire. L’étude révèle en effet que les boissons sucrées seraient plus nocives que les sucres consommés sous forme de «toppings» (comme le miel) ou de friandises (tels que les pâtisseries ou le chocolat). Les chercheurs ont étudié les habitudes alimentaires et le développement de maladies cardiovasculaires chez près de 70.000 Suédois sur une période de vingt-deux ans, qui a commencé en 1997. Au cours de cette étude, plus de 36% des participants ont été touchés par des pathologies cardiovasculaires.
«Dans les boissons sucrées, on inclut les sodas et les jus de fruits», indique Suzanne Janzi, chercheuse suédoise à Lund University en épidémiologie et auteur de l’étude publiée dans Frontiers in Public Health . «Même sans sucre ajouté, un jus de fruit peut contenir autant de sucre qu’un soda», précise Mathilde Touvier, directrice de recherche en épidémiologie nutritionnelle à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Ainsi, un verre de jus de pomme ou d’orange comprend autant de sucre que la même quantité de soda, et un verre de jus de raisin encore plus ! Or le problème de ces boissons, c’est la tendance à la surconsommation. «Elles ne contiennent pas de fibres, de protéines ou de gras, qui apportent de la satiété, déclare Suzanne Janzi, donc il est facile pour les consommateurs d’en boire beaucoup, et de dépasser les recommandations en calorie et en sucre.»
Soda et pâtisseries : des effets différents sur la santé cardiaque
Dans une canette de coca, on retrouve ainsi l’équivalent de 7 morceaux de sucres. «Il est aussi courant de consommer un verre de soda en dehors des repas, ce qui engendre un pic glycémique supplémentaire, impactant de manière plus importante le risque de maladie cardio-vasculaire», ajoute Guillaume Walther, professeur en physiologie expérimentale cardiovasculaire à l’Université d’Avignon. Une consommation de plus de 8 verres par semaine est par exemple associée à un risque 19% plus élevé d’AVC ischémique et à un risque 31% plus élevé d’anévrisme de l’aorte abdominale, selon l’étude. Et cela «sans compter l'augmentation du cholestérol et de l’hypertension, tous deux facteurs de risque des maladies cardiovasculaires. Cela a déjà été démontré dans d’autres études en lien avec la consommation de boissons sucrées», souligne Guillaume Walther.
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Ce qui est étonnant, c’est que la tendance ne semble pas être similaire pour les friandises. «Les chiffres montrent que les personnes qui en consomment 14 par semaine baissent leur risque de développer des problèmes cardiaques de 30%, comparés à ceux qui n’en consommeraient que 2», avance Suzanne Janzi. Cette recherche suggère donc que stopper ou réduire drastiquement sa consommation de sucre ne serrait pas forcément bénéfique. Elle précise cependant dans un communiqué que «les personnes qui consomment très peu de sucre pourraient avoir des régimes très restrictifs (...) en raison de problèmes de santé préexistants».
L’hypothèse sociale
Il est par ailleurs important de rappeler que de nombreuses études montrent les risques sur la santé de la surconsommation de sucre. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) recommande notamment de réduire l’apport en sucres libres à moins de 10% de la ration énergétique totale. Mais d’après cette étude, qui nécessite des recherches plus approfondies, une petite quantité quotidienne ne semblerait pas néfaste. En Suède, la pause de l’après-midi pour le café et les pâtisseries, appelée le «Fika», est une tradition. Certains chercheurs se demandent donc si le contexte social de la consommation de sucre n’influencerait pas le métabolisme. «Il reste à déterminer si les relations sociales peuvent expliquer ces associations, mais nous pensons que cela pourrait être une possibilité», énonce Suzanne Janzi. Notre goûter français pourrait-il avoir les mêmes effets ?
En plus de cette piste sociale, une question demeure: tous les sucres sont-ils métabolisés de la même manière par l’organisme ? Le sucre contenu dans un éclair au chocolat est-il synthétisé de la même manière que celui contenu dans un verre de jus d’orange ? «On suppose qu’il pourrait exister un effet différentiel entre les types de sucres (saccharose, fructose, lactose). Une étude en cours explore le lien entre ces sucres et le cancer, et des différences commencent à émerger entre le fructose et le saccharose par exemple. Ce sont des pistes à approfondir», avance Mathilde Touvier.