Investir dans les énergies renouvelables tout en construisant des centrales à charbon : le paradoxe énergétique de la Chine
La Chine joue un drôle de jeu sur le plan énergétique. En 2024, elle a lancé la construction de centrales thermiques au charbon pour une production totale de 94,5 gigawatts (GW) sur son sol, soit le niveau le plus élevé depuis 2015, selon un rapport paru jeudi 13 février par le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (Crea) et l’organisme américain Global Energy Monitor (GEM).
Pour donner un ordre d’idées, l’ensemble du parc nucléaire français, qui culmine à plus de 60 GW, fait pâle figure face au seul charbon chinois. La deuxième économie mondiale, plus grosse émettrice de gaz à effet de serre, concentre à elle seule 93 % des nouvelles installations de ce genre sur la même année au niveau mondial.
Des décennies durant, Pékin a tiré profit de l’exploitation du minerai noir pour alimenter ses industries et satisfaire une demande en énergie toujours plus croissante. Mais ce boom actuel relève du paradoxe : 4,8 milliards de tonnes ont ainsi été produites l’an dernier, à l’heure où les Chinois, en pleine transition énergétique, développent massivement les énergies renouvelables. Toujours selon le rapport, elle a installé pas moins de 356 GW de nouvelles capacités éoliennes et solaires, en 2024. Là aussi, le chiffre a de quoi faire frémir : c’est 4,5 fois plus que l’Union européenne.
Mix énergétique à rebours de l’accord de Paris de 2015
« L’expansion rapide des énergies renouvelables en Chine a le potentiel de remodeler son système électrique, mais cette opportunité est compromise par l’expansion simultanée à grande échelle de l’énergie issue du charbon », s’étonne Qi Qin, auteur principal du rapport. En 2021, le président Xi Jinping avait promis une baisse progressive de la consommation de charbon entre 2026 et 2030. Si Pékin se targue de vouloir atteindre la neutralité carbone d’ici à 2060, avec un pic d’émissions fixé vers 2030, ce développement massif du charbon inquiète.
Celui du renouvelable était censé permettre un abandon progressif des énergies fossiles. Il en ressort aujourd’hui un mix énergétique complètement anachronique face au réchauffement climatique et au respect de l’accord de Paris, avec 44 % de la production assuré par les énergies renouvelables en mai 2024, contre 53 % pour le minerai noir.
« En l’absence de changements politiques urgents, la Chine risque de renforcer un modèle d’énergies additionnelles plutôt que de transition, limitant ainsi le plein potentiel de son essor en matière d’énergie propre », souligne le CREA. Dans le détail, les chercheurs questionnent un choix privilégié du charbon sur le renouvelable pour produire de l’électricité dans certaines régions du pays. Ils préconisent aux Chinois de réduire leurs émissions d’au moins 30 % d’ici à 2035 s’ils veulent rester dans les clous de leurs objectifs climatiques. En la matière, Pékin publiera prochainement les détails de son 15e plan quinquennal pour la période 2026-2030, et devrait également soumettre ses nouveaux objectifs de réduction des émissions (NDC) aux Nations Unies.
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