Le Figaro Lyon
Cinq hommes âgés de 29 à 35 ans ont été interpellés à Grenoble dans le cadre d'une enquête visant un important réseau de faux papiers et de création de comptes Uber à l'adresse d'étrangers en situation irrégulière en France.
En janvier et mars 2023, les douanes de l’aéroport Saint-Exupéry de Lyon ont intercepté des colis expédiés depuis Grenoble à destination de la Turquie renfermant 32 cartes nationales d'identité et neuf passeports authentiques signalés volés en Isère.
Vols de passeports et création de faux papiers
Les investigations menées par les policiers du détachement de l'Office de lutte contre le trafic illicite de migrants de l'Isère, sous la direction du parquet de Grenoble puis sur commission rogatoire de la juge d'instruction, ont permis d'identifier différents expéditeurs agissant selon un même mode opératoire mais sous couvert de fausses identités. Ils ont mis au jour l'existence d'une organisation chargée d'envoyer les documents volés vers les faussaires turcs, «leaders actuels de la falsification ou contrefaçon de documents d'identité», indique le parquet de Grenoble dans un communiqué.
La poursuite des investigations (téléphonie, comptes bancaires...) a mis en exergue un vaste réseau qui, au-delà de la collecte (rachat des documents volés de victimes exclusivement de jeunes hommes majeurs) et l'expédition des documents français volés, réceptionnait par ailleurs des faux documents européens provenant de Turquie revendus à des étrangers en situation irrégulière sur le territoire.
Vente de comptes Uber Eats
Cette double activité criminelle s'est accompagnée de la création et la revente de comptes auprès de la société de livraisons de repas Uber Eats monnayés entre 1000 et 1500 euros pièce. Ces comptes étaient ouverts sur la base de faux documents sociaux (K-bis, domiciliation) et identitaires via l'utilisation de documents d'identité faux ou volés puisés dans la base documentaire dématérialisée constituée par la tête de réseau (un algérien de 35 ans en règle sur le territoire français). Une soixantaine de comptes ont été découverts.
Cette même tête de réseau ouvrait et gérait des comptes bancaires à l'aide de faux documents sur lesquels étaient versées les courses et les utilisait pour ses virements d'argent. Il se rémunérait par l'ouverture frauduleuse du compte Uber que lui et ses complices sous-louaient aussi pour leur usage moyennant 100 euros par semaine.
Il était aidé dans sa tâche par un réseau de rabatteurs étrangers en situation irrégulière rayonnant à Grenoble, Lyon et dans les Alpes-Maritimes qui proposaient les différentes prestations aux clients moyennant une rémunération en qualité d'apporteur d'affaires.
Les cinq suspects ont été déférés et mis en examen par la juge d'instruction le 10 octobre pour «recel en bande organisée d'un bien provenant d'un vol, aide à l'entrée et au séjour irrégulier d'étrangers en bande organisée, fourniture frauduleuse de documents administratifs constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, détention et usage de faux documents d'identité, blanchiment concours à une opération de placement, aide à la justification mensongère de l'origine des biens de l'auteur d'un délit d'aide à l'entrée et séjour irrégulier d'un étranger». Quatre d'entre eux ont été placés en détention provisoire et le cinquième sous contrôle judiciaire.