La protection de l’enfance a besoin d’un ministre de plein exercice

Que penser de l’annonce par le président de la République de la création d’un Haut-Commissariat à l’Enfance, une semaine après celle du gouvernement ? Faut-il y voir la tentative de masquer l’absence d’un ministère de plein exercice ? Une chose est sûre, la protection de l’enfance traverse une crise systémique qui exige la mise en œuvre urgente d’une politique interministérielle en faveur des enfants et des jeunes qui soit transversale, cohérente et intégrée, seule capable de gérer la situation avec sérieux.

En France, la protection de l’enfance est dans un état d’urgence qui nécessite un ministère de plein exercice doté de moyens humains et financiers.

Dans un avis adopté en octobre dernier, le Conseil économique, social et environnemental confirmait la situation inacceptable de la protection de l’enfance. En bref : alors que 344 682 mineurs ou jeunes majeurs sont pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE) en France, toutes prestations et mesures confondues (un chiffre en augmentation de 18 % depuis 2011 selon l’ONPE), plus de 70 % des juges pour enfants disent avoir déjà renoncé à prendre des décisions de placement d’enfants en danger faute de solutions. Voilà ce qui attend un Haut-Commissariat à l’Enfance dont on ne sait encore rien !

Pour l’heure, la situation d’urgence qui caractérise la protection de l’enfance ne permet pas de protéger les jeunes confiés à l’ASE contre les violences de toutes sortes ni de répondre convenablement aux enjeux liés à leur santé mentale, et encore moins de développer une culture sensible au psychotraumatisme des enfants et des jeunes, qui est pourtant une impérieuse nécessité.

Il en va de même des enjeux liés à la scolarité des enfants protégés qui devrait être une priorité absolue, tant la réussite scolaire conditionne leur avenir en tant qu’adulte. Quant aux jeunes majeurs, il reste beaucoup à faire, en transversalité, pour permettre à tous les jeunes de ne pas connaître de sortie sèche de l’aide sociale à l’enfance sans logement, soutien affectif et financier.

Capacités d’accueil, santé, éducation… les défis sont tels que seule une autorité politique de plein droit, capable de coordonner les actions entre les différents ministères avec des moyens humains et financiers à la hauteur des besoins, permettra de sortir des difficultés actuelles de la protection de l’enfance et pourra, enfin, mettre en œuvre les mesures annoncées par le passé comme par exemple, en lien avec SOS Villages d’Enfants, réunir les fratries confiées et les accompagner jusqu’à l’âge adulte.

Dans le monde, les droits des enfants reculent, appelant plus que jamais à la solidarité internationale. À travers le monde, un enfant sur dix vit sans protection parentale ou risque de la perdre. Ce constat alarmant appelle à une solidarité internationale renforcée. La France doit prendre ses responsabilités et investir durablement dans les droits des enfants, tant sur son sol qu’à l’international.

Or, cela ne sera possible que par l’action résolue d’un ministère de plein exercice dédié à l’enfance, armé pour répondre aux urgences actuelles et suffisamment fort pour faire valoir, en France et à l’international, les droits des enfants comme une priorité dans le débat public.

La cause des enfants est la cause de tous car elle dessine un projet de société, celui d’un monde apaisé et plus juste, dans lequel chaque individu a non seulement le droit mais la possibilité de réaliser son potentiel. La société de demain, qui émerge au prix de douloureuses transitions, gagnerait à faire des droits de l’Enfant un moteur puissant de transformation.

Avant de partir, une dernière chose…

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