REPORTAGE. "Les droits de douane font vraiment du mal aux agriculteurs" : en Géorgie, les producteurs de noix de pécan se préparent à subir les conséquences des décisions de Donald Trump
Les droits de douane imposés par les Etats-Unis de Donald Trump à de nombreux produits importés sur le marché américains, entrent en vigueur mercredi 2 avril. De leur côté, les pays touchés par ces droits de douane mettent en place leurs propres barrières douanières contre certains produits américains.
La Géorgie, dans le sud-est des Etats-Unis, état pro-Trump et agricole qui vend beaucoup à l'étranger, devrait subit les conséquences de cette guerre commerciale.
"Avec les deux mandats de Trump, on n'a pas pu exporter autant qu'on aurait voulu"
La Géorgie exporte du coton, des cacahuètes ou de la volaille mais c'est aussi l'Etat américain qui produit et exporte le plus de noix de pécan, culture emblématique que l'on trouve dans le sud de l'Etat, des zones très rurales et très conservatrices. Dans le verger de Cody Casey, à Hawkinsville, des ouvriers agricoles sont occupés à faire le grand ménage de printemps entre les arbres, sur une exploitation de petite taille, lancée il y a dizaine d'années. "On a choisi de planter une variété qui est faite pour l'exportation vers la Chine. Mais avec les deux mandats de Trump et les taxes douanières qui ont été imposées, on n'a pas pu exporter autant qu'on aurait voulu donc on a dû vendre sur le marché américain."
Il y a huit ans, Donald Trump avait déjà lancé des hostilités commerciales avec la Chine, l'un des importateurs historiques de noix de pécan américaine. Pékin, cette fois encore, réplique par des droits de douane majorés, en l'occurrence à 52%, soit quatre fois plus que l'année dernière : "C'est beaucoup, oui ! La dernière fois qu'on avait eu ce genre de droits de douane, on était passé d'un prix de vente de deux dollars par livre, à 1,35 dollar."
La crainte c'est que ce soit la même chose cette année. Alors Cody a beau se dire conservateur, dans ses idées, il ne soutient pas Donald Trump et c'est plutôt rare dans son milieu : "Je ne peux pas dire que je suis d'accord avec Trump. J'ai soutenu certaines choses qu'il avait faites pendant son premier mandat. Mais les droits de douane font vraiment du mal aux agriculteurs."
"On a laissé trop longtemps les autres pays profiter de nous"
Mais le reste de la filière n'est pas forcément du même avis. Franceinfo s'est rendu à la conférence annuelle des producteurs de noix de pécan de Géorgie, un grand hall d'exposition avec d'immenses machines agricoles en démonstration, sous un drapeau américain lui aussi très imposant et dans une ambiance assurée par un chanteur country. Entre deux stands, Mike Horn, producteur de père en fils, se décrit spontanément comme "très conservateur".
Quand on lui demande ce qu'il pense de la politique menée par Donald Trump, pas d'hésitation, Mike est "très content de la direction que son président donne au pays". À commencer par cette pression tous azimuts mise dans les négociations commerciales, avec la Chine mais aussi des pays alliés comme les Européens, le Canada ou le Mexique : "C'est toujours un problème quand quelque chose fragilise notre agriculture. Mais je trouve qu'on a laissé trop longtemps les autres pays profiter de nous."
"Je veux qu'on défende vraiment nos intérêts et si pour ça, il faut que je traverse des temps difficiles, je l'accepte !"
Mike Horn, producteur de noix de pécanà franceinfo
Un agriculteur américain prêt à payer le prix de la politique commerciale agressive, menée par Donald Trump, c'est un discours que l'on entend beaucoup chez les supporters du président. Cette idée qu'il y a forcément un mauvais moment à passer si on veut bousculer l'ordre établi et remettre l'intérêt des Américains au premier plan sur le plus long terme.
"À côté de ça, il y a des changements positifs pour nous dans l'administration"
Mais tout de même, attention à ce que l'agriculture ne soit pas la grande perdante de cette politique, au détriment de l'industrie américaine, dit Jeff Childress. Il est l'un des plus gros producteurs de noix de pécan de Géorgie : "Personne n'est content avec les droits de douane mais à côté de ça il y a des changements positifs pour nous dans d'administration, notamment l'agence de l'environnement qui dérégule. Ça compense. Il y avait beaucoup de mauvaises choses pour les agriculteurs dans la précédente administration mais il n'y avait pas de droits de douane."
La dérégulation, baisser les normes environnementales notamment pour permettre aux agriculteurs de produire plus, c'est comme ça que la filière espère se remettre des pertes dues aux droits de douane. Mais d'un autre côté, beaucoup d'engrais et de produits chimiques sont importés du Canada, de Chine, et vont aussi coûter plus cher à cause de la guerre commerciale. Pour continuer au nouvel âge d'or que leur vend Donald Trump, les agriculteurs se raccrochent, à présent, aux subventions qu'on leur promet pour survivre à la crise qui s'annonce.