REPORTAGE. "J'ai perdu sept membres de ma famille" : en Syrie, de premiers civils druzes, traumatisés par les combats, ont pu quitter Soueïda
À Soueïda, dans le sud de la Syrie, une poignée de premiers civils druzes ont enfin pu quitter la ville. Il s'agit majoritairement de femmes et d'enfants qui n'ont pas été blessés, mais sont profondément marqués. Ils ont fui les combats et les exactions, parfois après avoir vu leurs proches tués sous leurs yeux. Réfugiés dans des écoles ou des bâtiments publics à la frontière du gouvernorat, ils attendent désormais que la situation s'apaise.
Dans une salle de classe poussiéreuse d'une trentaine de mètres carrés, une vingtaine de femmes dorment à même le sol. Elles font partie des premières rescapées sorties vivantes de Soueïda. La plupart ont tout perdu, comme Jamila, qui habitait le centre-ville. Agée de 40 ans, elle confie avoir vu son fils mourir sous ses yeux. "Il n'était pas un soldat. C'est un simple civil. Il travaillait comme coiffeur. Sa vie, c'était maison, travail. Il n'a jamais fait de mal à personne. Pourquoi ces groupes armés l'ont tué ? Après ça, ils ont volé nos affaires, brûlé ma maison. Ils nous ont laissés à la rue."
Des hommes armés, en treillis...
Assise près d'elle, Souhad, 83 ans, a vu sa maison devenir un cimetière. Des hommes en treillis militaire qu'elle ne sait identifier ont exécuté devant elle tous les hommes de sa famille. "Je pensais que les groupes armés druzes nous protégeraient. Mais des hommes armés sont tout de même venus chez nous et ont tué tous les hommes de la famille", témoigne-t-elle.
"Mes deux fils, leurs beaux-frères, tous ont été exécutés devant les enfants. Quatre petits-enfants ont vu leur père mourir sous leurs yeux. Six hommes ont été tués ce jour-là. Et plus tard, mon dernier fils est mort lui aussi. J'ai perdu sept membres de ma famille."
Souhadà franceinfo
Ces femmes, traumatisées, sont aujourd'hui cachées par la sécurité intérieure. Elles ne parlent que peu et ne mangent pas. Leur témoignage reflète une réalité que personne n'ose encore nommer : dans cette guerre éclatée, les lignes de front sont devenues floues et les civils paient le prix d'un chaos où plus personne, pas même les figures locales, ne semble en mesure de garantir leur sécurité.