Plan blanc dans 87 hôpitaux, manque de vaccins, possible 2e vague… Comment la grippe met à mal notre système de santé

Lits saturés, brancards qui ne cessent de s’accumuler aux urgences, personnels sous haute tension… Dans quasiment tous les hôpitaux, c’est le même scénario. L’épidémie de grippe qui sévit partout en France met à rude épreuve les équipements publics – centres hospitaliers mais aussi CHU -, déjà confrontés d’ordinaire à une crise structurelle, conséquence de politiques désastreuses menées depuis des années par les pouvoirs publics. À titre d’exemple, depuis 2013, pas moins de 27 000 lits ont fermé.

Ce vendredi 10 janvier, le ministère de la Santé vient d’annoncer que 87 hôpitaux ont activé le plan blanc, dispositif qui permet de déprogrammer certaines opérations ou de rappeler des soignants de la fonction publique hospitalière lors de leurs congés. Sur franceinfo, Gilles Pialoux, le chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Tenon à Paris s’est dit « très préoccupé » face « à une situation très tendue ».

Hausse de la part des décès avec mention de grippe

« Ce qui se profile aujourd’hui, c’est une épidémie dense, même si nous ne sommes pas encore au pic et qu’il nous manque certaines informations », constate la virologue Anne Goffard. Pendant les fêtes de fin d’année, les nombreux déplacements, les accolades et les réunions en famille ont largement favorisé la propagation des infections respiratoires aiguës (IRA), avec une majorité de grippe A, un peu de grippe B et quelques cas de Covid.

« On est sur une épidémie de grippe au-dessus du pic de l’année dernière, a précisé pour l’AFP le virologue Bruno Lina. Il y a une circulation importante du virus, et des groupes de patients infectés jusqu’alors plus jeunes que d’habitude, des grands enfants et des adultes jusqu’à 50 ans ».

Ce que confirme Santé publique France. Dans le bulletin hebdomadaire de l’institut du mercredi 8 janvier, qui prend en compte les chiffres de l’activité grippale sur la semaine du 30 décembre au 5 janvier, il est indiqué que « l’épidémie de grippe s’est accentuée » à nouveau en ce début d’année avec « une forte augmentation à l’hôpital dans toutes les classes d’âges, excepté chez les 5 – 14 ans ».

Première région touchée cette année : l’Île-de-France, une à deux semaines avant le reste du pays. La région francilienne devrait basculer en phase post-épidémique assez rapidement alors que les autres régions vont encore monter en puissance.

« La part des hospitalisations pour grippe et syndrome grippal (…) se situait à un niveau d’intensité exceptionnellement élevé par comparaison aux saisons antérieures. De plus, la part des décès avec une mention de grippe était encore en forte hausse, 6 % lors de cette semaine contre 3,9 % lors de la dernière semaine de 2024 », note-t-on dans le bulletin hebdomadaire. Santé publique France précise : « le nombre de passages aux urgences pour syndrome grippal était de 18 391, soit 5,2 % des passages (contre 5 % en dernière semaine de 2024) ».

Une deuxième vague est prévisible

Ces épisodes grippaux qui commencent tôt n’augurent rien de bon. Une deuxième vague pouvant très bien se déclarer. Comme en 2017 – 2018 où la grippe avait engendré une surmortalité estimée à 13 000 morts durant l’hiver. « Beaucoup de personnes pensent être en bonne santé et estiment que la grippe, après tout, ce n’est pas si grave. Ce qui est totalement faux, tempête Anne Goffard. Chaque année, des gens se retrouvent en réanimation à cause de la grippe alors qu’ils allaient parfaitement bien avant. La grippe, c’est non seulement grave, mais aussi très contagieux. »

Une sous-estimation du virus palpable notamment avec le faible taux de la couverture vaccinale, malgré les campagnes de sensibilisation commencées cet automne. À peine dix millions de personnes sont vaccinées. « S’il est vrai que même en étant vacciné il est possible d’attraper la grippe, il est important de rappeler que le virus sera beaucoup moins virulent et qu’on ne finira pas en réanimation », insiste la virologue.

Les vaccins en rupture de stock

La campagne de vaccination se poursuit jusqu’au 31 janvier. Mais pris de panique au regard d’une épidémie précoce et virulente, les Français se ruent aujourd’hui dans les pharmacies en quête du vaccin. Pharmacies qui se trouvent pour beaucoup… en rupture de stock.

Alors que la région PACA, en alerte rouge, affiche l’un des taux d’incidence les plus élevés en France, des IRA, les réserves des pharmacies, qui ont commandé le même stock de vaccins que l’an passé, sont vides. Alors faute de mieux, Anne Goffard rappelle les attitudes de bon sens. « Dès que l’on se sent enrhumé, au moindre signe, on se protège. On met le masque », affirme la virologue.

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