#onvousrépond. Mobilisation, financement, arme nucléaire… Nos réponses à vos questions sur l'effort de guerre de la France et de l'UE pour aider l'Ukraine
Non. A ce jour, la France n'a jamais affiché l'intention d'envoyer des soldats qui seraient directement engagés dans les combats contre la Russie. "La France ne dispose pas d'unité constituée de soldats qui participent directement aux combats ou aux manœuvres en Ukraine", confirme le général Jérôme Pellistrandi.
En revanche, il est question d'envoyer prochainement des instructeurs militaires français en Ukraine pour former et assister les soldats sur place. Emmanuel Macron a évoqué jeudi 27 mars le lancement d'une mission franco-britannique pour préparer "ce que sera le format de l'armée ukrainienne". Il s'agit d'"une équipe pluridisciplinaire avec des spécialistes de la doctrine, des ressources humaines ou encore de l'entraînement", a détaillé l'état-major français dans Le Monde.
Par ailleurs, Emmanuel Macron a évoqué à plusieurs reprises un possible déploiement de forces de "plusieurs pays européens" après un éventuel accord de paix. Même si les pays soutenant l'Ukraine ne sont pas unis sur cette question, l'unanimité n'est pas nécessaire, a-t-il affirmé jeudi 27 mars : "C'est bien acté et nous allons avancer. Et donc il y aura bien une force de réassurance avec plusieurs pays européens qui se déploieront", a-t-il promis.
Le président français pose plusieurs conditions. La première : que les armes se taisent en Ukraine. Dans son esprit, les troupes françaises ne pourraient avoir d'autre rôle que celui de s'assurer que "la paix est bien respectée", a asséné Emmanuel Macron en février, lors de sa visite à Washington.
Jeudi 27 mars, le chef de l'Etat a précisé que "ces forces de réassurance" seraient "présentes dans certains endroits stratégiques déterminés avec les Ukrainiens" et "auraient un caractère de dissuasion" pour éviter toute nouvelle agression russe. En revanche, elles n'ont pas vocation "à être des forces présentes sur la ligne de contact" et "à se substituer aux armées ukrainiennes". Le Royaume-Uni, la Suède ou encore la Belgique sont aussi prêts à participer. Mais pour l'instant, le nombre de soldats reste extrêmement flou.
Autre prérequis, pour Emmanuel Macron : pouvoir s'appuyer sur "la solidarité et le soutien américains", "indispensables" en cas de déploiement "de forces de paix sur le sol ukrainien". Mais en pleine volte-face face à Volodymyr Zelensky, Donald Trump a répété qu'il excluait tout envoi de soldats.
Moscou ne voit évidemment pas d'un très bon œil cette implication des pays européens. "Le déploiement de troupes de forces armées des pays de l'Otan, mais sous un autre drapeau – celui de l'Union européenne ou sous des drapeaux nationaux – ne change rien. C'est bien sûr inacceptable", a déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, le 20 février.
L'armée française étant composée d'un peu plus de 200 000 militaires professionnels, ils seraient appelés les premiers en cas d'engagement officiel de l'armée française sur le front ukrainien. L'Etat français pourrait aussi faire appel à la réserve militaire opérationnelle. Elle regroupe des volontaires qui interviennent en renfort des militaires professionnels sur des missions ponctuelles.
Lors du dernier recensement en octobre 2024, ces réservistes étaient 44 535, répartis entre l'armée de terre, la marine nationale, l'armée de l'air et de l'espace.
En France, les anciens militaires restent par ailleurs mobilisables cinq ans après leur départ.
Reste la question de la mobilisation des civils. Si celle-ci n'a pas été décrétée depuis près d'un siècle (en septembre 1939, après l'invasion de la Pologne par l'Allemagne), elle reste prévue par le Code de la défense. Elle peut être "partielle ou générale", selon l'article L2141.
Sollicité par franceinfo, le ministère des Armées précise : "La mobilisation, si elle venait à être décidée, le serait par décret pris en Conseil des ministres et signé par le Président de la République. Le pouvoir politique déciderait alors quelles seraient les personnes concernées par la mobilisation (hommes, femmes, tranches d'âges…) et cela serait stipulé dans le décret."
Oui, à certaines conditions : être Français, avoir entre 17 et 72 ans, avoir une bonne condition physique, un casier judiciaire vierge et avoir effectué le service national ou la journée défense et citoyenneté. Pour postuler, vous devez remplir le formulaire dédié sur le site service-public.fr. Les réservistes servent en moyenne trente jours par an, sur une période maximale de cinq ans. Ils sont rémunérés entre 40 et 200 euros par jour.
Dans ce contexte de montée des tensions internationales, le gouvernement ambitionne de doubler le nombre de réservistes d'ici à 2035 pour atteindre le cap des 105 000, fixé dans la loi de programmation militaire 2024-2030. Le ratio serait alors d'un réserviste pour deux militaires actifs.
Depuis le début de l'année, plus de 12 000 Français se sont déjà portés candidats pour intégrer la réserve opérationnelle militaire, selon le ministère des Armées.
Selon les données du ministère des Armées (document PDF, page 13), 201 332 militaires professionnels composaient l'armée française en 2024 : 111 851 dans l'armée de terre, 38 882 dans l'armée de l'air et 34 685 dans la marine.
L'armée française est la deuxième la plus fournie en Europe, derrière la Pologne (216 000 soldats), et devant l'Allemagne (181 000 soldats).
L'hypothèse n'est pas à l'ordre du jour, assure Emmanuel Macron. Le président de la République lui-même a évacué le retour au service militaire obligatoire, tel qu'il existait dans le pays jusqu'en 1997. "A partir du moment où l'on a professionnalisé nos armées, focalisées sur l'opérationnel, les réemployer pour encadrer 800 000 jeunes n'est ni opérant, ni réaliste à court terme", justifie Emmanuel Macron.
Plutôt que de rappeler les jeunes majeurs sous les drapeaux, le chef de l'Etat demande au gouvernement et à l'état-major des armées des propositions d'ici au mois de mai pour "permettre à une jeunesse volontaire d'apprendre avec les armées et d'en renforcer les rangs". Il veut "proposer à notre jeunesse un engagement fort" pour lui "donner le choix de servir (…). Aujourd'hui, nous nous contentons d'un recensement, d'une journée défense et citoyenneté. C'est trop peu".
Cette réforme passerait par une refonte du Service national universel, pour que celui-ci "corresponde aux besoins de la nation et aux priorités que nous avons identifiées".
Oui. "Il n'y a pas de critères femmes-hommes dans les armées. Il y a des critères d'aptitude au combat éprouvés par une formation, un entraînement et des qualifications opérationnelles. Des femmes militaires participent depuis longtemps et en nombre à des opérations", commente auprès de franceinfo le ministère des Armées.
L'instauration d'une armée de métier a favorisé la féminisation des troupes. En 1995, les femmes représentaient 7,5% des effectifs. En 2024, ce taux grimpait à 17% (document PDF, page 15).
Par ailleurs, en cas de mobilisation générale, le ministère des Armées ne précise pas qui serait appelé au front : "La mobilisation, si elle venait à être décidée, le serait par décret pris en Conseil des ministres et signé par le Président de la République. Le pouvoir politique déciderait alors quelles seraient les personnes concernées par la mobilisation (hommes, femmes, tranches d'âges…) et cela serait stipulé dans le décret".
Un petit manuel sur la conduite à tenir en cas de crise est en cours d'élaboration. Disponible d'ici au printemps, il s'adressera à la population française, comportera une vingtaine de pages et doit s'articuler en trois parties : "se préparer", "réagir" et "s'engager". "Ce document a vocation à assurer la résilience des populations face à tout type de crises, qu'elles soient naturelles, technologiques, cyber ou sécuritaires", précise à franceinfo l'entourage du Premier ministre.
Néanmoins, il ne s'agit "pas du tout" de préparer la population à la perspective d'une guerre, comme a pu le faire la Suède, par exemple, insiste une source auprès de franceinfo. "Ce manuel n'est pas directement lié au contexte international actuel. C'est bien plus large que ça." En effet, si la notion de conflit armé sera bien évoquée, ce fascicule détaillera aussi les bonnes conduites à adopter en cas d'accident industriel, d'épidémie, de fuite radioactive, de crue, ou d'événement climatique grave.
La Commission européenne a invité, mercredi 26 mars, les pays de l'Union à inciter leurs ressortissants à préparer un kit de survie leur permettant de tenir trois jours en autonomie en cas de crise. Un "sac de résilience", selon l'expression de la commissaire européenne Hadja Lahbib, interrogée par l'AFP.
Dans une vidéo publiée sur X, elle en dévoile une partie du contenu : des lunettes de vue, ses papiers d'identité dans un contenant hermétique, une lampe de poche, un briquet. Mais aussi de l'eau, des barres de céréales, des boîtes de conserve, un couteau suisse, des médicaments, de l'argent liquide, un chargeur de téléphone portable, une radio, et même un jeu de cartes. "C'est ce dont vous avez besoin pour survivre les 72 premières heures d'une crise", assure-t-elle, sans évoquer spécifiquement le contexte d'une guerre.
En France, les autorités préconisent déjà de préparer un kit de survie similaire depuis août 2024. Il peut être utile en cas de "catastrophe majeure" qui pourrait provoquer d'éventuelles coupures d'électricité, de gaz, d'eau courante ou encore rendre les routes "impraticables". Par ailleurs, un petit manuel sur la conduite à tenir en cas de crise est aussi en cours d'élaboration. Ce document d'une vingtaine de pages doit s'articuler en trois parties : "se préparer", "réagir" et "s'engager".