REPORTAGE. "Ils vivent dans la terreur permanente et l'isolement" : près de la ligne de front en Ukraine, l'armée russe vise les civils avec des drones tueurs
En Ukraine, les frappes russes se poursuivent alors que sur le front diplomatique, Donald Trump va appeler Vladimir Poutine, lundi 19 mai, pour lui demander de mettre fin à la guerre. Samedi, une frappe de drone a visé un minibus et tué neuf civils, près de la ville de Soumy. Dans les zones frontalières comme celle-ci, les drones à courte portée sont de plus en plus meurtriers pour les civils.
Le 24 octobre 2024. Liubov Temofila, 71 ans, faisait son marché chez elle, à Koupiansk, quand la mort est tombée du ciel. "J’étais à 30 mètres du lieu de l’explosion", se souvient-elle. "J’ai vu une grande traînée de feu, puis un bourdonnement et une silhouette noire qui ressemblait à un petit avion", poursuit la vieille dame, victime d’une commotion cérébrale. Des éclats de métal lui entaillent le front. Il lui reste une belle cicatrice et un œil droit un peu capricieux. "J’ai une seule question : Pourquoi ? Pourquoi souffrons-nous ? Pourquoi le peuple ukrainien est-il tombé dans cette guerre ?" s'interroge Liubov. "Mais ça va aller, on va gagner et, si on garde du soleil dans notre âme, tout ira bien !" L'Ukrainienne, désormais suivie par Handicap International dans un foyer de réfugiés de Kharkiv, entame un chant de sa jolie voix pour éloigner la peur.
Les civils ciblés n'importe où
À Koupiansk, comme dans toutes les villes proches de la ligne de front, les habitants sont quotidiennement sous le feu des bombes, des tirs d'artillerie, des lance-roquettes, mais aussi des drones à courte portée. Ces engins légers, rapides, pilotés à distance et équipés d’une caméra, n'ont que quelques kilomètres à faire pour larguer leur charge explosive sur tout ce qu’ils trouvent.
"Les voitures particulières, les bus publics, les civils lorsqu'ils sont à l'extérieur, à vélo, à pied, ou même debout sur leur propre terrain, en train de jardiner ou de nourrir leurs chiens", détaille Danielle Bell, responsable de la mission de surveillance des droits de l'homme des Nations unies en Ukraine. "Nous avons eu le cas d'une femme qui a été blessée quand elle est sortie de chez elle pour nourrir son chien", insiste-t-elle.
Danielle Bell explique que des Ukrainiens racontent "qu'ils vivent dans la terreur permanente et l'isolement". "Or les opérateurs de drones sont censés distinguer leurs cibles, vérifier qu'elles sont bien militaires et pas civiles", rappelle-t-elle. "Le monde doit faire pression sur la Russie pour qu'elle respecte le droit international humanitaire." Tous les jours, dans les zones frontalières, les drones à courte portée font des victimes. Ils sont devenus la menace numéro 1 des civils.