Iran : quand Donald Trump piétine sa doctrine anti-guerre encouragé par les chrétiens évangéliques blancs

Washington D.C. (États-Unis), envoyé spécial.

Un mensonge. Un de plus. Quand Donald Trump a déclaré, jeudi 19 juin, qu’il se donnait deux semaines pour décider de la position américaine sur l’Iran, il est désormais clair qu’il s’agissait d’une tromperie. Un plan était déjà préparé et lancé, puisque, dès le lendemain les bombardiers décollaient des États-Unis pour se diriger, en deux groupes (l’un par l’est, l’autre par l’ouest), vers le Moyen-Orient.

Des sources au sein de l’administration Trump ont argué, dans des propos off livrés à la presse, que ce faux suspense visait à tromper la vigilance des autorités iraniennes. Comme si celles-ci, en pareilles circonstances, auraient pu relâcher leur attention. L’objectif de la petite phrase sur le délai avait plus certainement à voir avec la politique intérieure.

Une attaque retardée pour ne pas heurter la frange « isolationniste »

En ne décidant pas à chaud de répondre positivement à la demande de Benyamin Netanyahou que les États-Unis bombardent les sites nucléaires iraniens, Donald Trump a surtout voulu ménager la frange « isolationniste » de sa coalition. Il n’y a probablement jamais eu de doute, dans son esprit à propos de son alignement sur la demande du premier ministre israélien. Donald Trump a simplement penché du côté le plus puissant de sa coalition : les chrétiens évangéliques blancs.

Dans les sondages, ceux-ci apparaissent comme le seul segment de l’électorat réellement satisfait des premiers mois de mandat de Donald Trump. Ils continuent donc, quel que soit le climat politique général, à demeurer les plus fervents partisans d’un président qui n’a pourtant jamais brillé par sa piété personnelle. Le socle des socles. Leur attitude vis-à-vis d’Israël ne relève pas pour eux d’une question de politique internationale.

Elle est consubstantielle à leur rapport politique au monde. Ted Cruz l’a exprimé lors de son face-à-face tendu avec l’ancien présentateur vedette de Fox News Tucker Carlson. Lui-même évangélique, le sénateur du Texas a cité la Bible pour justifier son soutien aveugle à Israël, quelle que soit la politique menée par le gouvernement en place. Peu importe qu’il ait tronqué le passage de la Genèse cité pour justifier son alignement sans faille.

Il faut retenir que l’alliance entre les chrétiens évangéliques blancs et l’extrême droite au pouvoir à Tel-Aviv repose sur la croyance en la littéralité d’un texte religieux. Les deux considèrent donc que la Bible constitue un acte de propriété du « peuple juif » sur la terre d’Israël. Un argument que convoquait déjà David Ben Gourion, fondateur de l’État d’Israël, pourtant laïc.

Donald Trump rattrapé par sa promesse contre les « guerres sans fin »

Cet arbitrage de Donald Trump en faveur d’une intervention militaire directe en Iran pose néanmoins un problème politique de taille au président de l’« America First ». Lors de sa campagne pour la primaire républicaine, le milliardaire avait développé un discours contre les « guerres sans fin », jouant de son opposition à la guerre en Irak.

En fait, il y était favorable en 2002 mais a changé d’avis en 2004 au regard de la catastrophe qu’elle avait créée. Néanmoins, une frange des électeurs républicains s’était montrée séduite par son positionnement opposé à celui des néoconservateurs, favorables, eux, à l’imposition de la démocratie dans le monde, fût-ce à coups de canons. Voilà que les bombardements du samedi 21 juin en Iran font voler en éclats ce « récit », dans un contexte de forte opposition de l’opinion publique.

Selon un sondage YouGov pour The Economist, réalisé avant l’attaque de samedi 21 juin, 19 % seulement des électeurs de Donald Trump étaient favorables à une implication de leur pays en Iran. Même si le prochain rendez-vous électoral ne se profile qu’à l’horizon de l’automne 2026 (élections de mi-mandat), le coût politique pour l’administration Trump peut s’avérer très lourd.

Le vice-président, J.D. Vance, très intéressé par la succession, l’a bien compris et a tenté de limiter la casse d’une formule incertaine : « Nous ne sommes pas en guerre avec l’Iran, nous sommes en guerre avec le programme nucléaire iranien. » Mais ce fut pour être aussitôt contredit par Donald Trump, qui a ouvertement envisagé un « changement de régime » à Téhéran. C’est le souhait non dissimulé de Benyamin Netanyahou. Donald Trump le suivra-t-il jusqu’au bout, quitte à devenir un autre George W. Bush ?

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