« On ne se laissera pas entraîner dans une guerre globale » : avec les Américains dans la rue contre la guerre de Trump au Moyen-Orient
New York et Baltimore (États-Unis), envoyés spéciaux.
Quel meilleur endroit, à New York, que le célèbre Times Square pour organiser une manifestation ? Dans ce qui semble être un chaudron, plusieurs centaines de personnes se sont donné rendez-vous dimanche après-midi pour dénoncer les bombardements états-uniens contre l’Iran.
« Nous exigeons la fin immédiate des attaques américaines et israéliennes contre l’Iran et sa souveraineté », avaient écrit les organisations qui avaient appelé à ce rassemblement. Parmi elles, The People’s Forum, Answer Coalition et Palestinian Youth Movement. « Trump et ses faucons de guerre lancent une nouvelle guerre qui met le monde en danger », alertent-elles.
Sous les yeux ébahis de milliers de touristes aux yeux rivés sur les écrans géants diffusant en boucle toutes les images publicitaires possibles et imaginables, les manifestants ont crié à pleine voix leur désaccord avec la politique guerrière de Donald Trump, alors que des tambours rythmaient les slogans.
Beaucoup brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « De l’argent pour les gens dans le besoin, pas pour la machine de guerre », « Pas de nouvelle guerre au Moyen-Orient » ou encore « Trump est un criminel de guerre ». Personne ne fait attention aux quelques drapeaux états-uniens et israéliens cousus ensemble, ni à ceux des royalistes iraniens, qui prennent bien garde de rester à l’écart.
La diplomatie reste la seule solution
Sur une tribune improvisée, un homme prend la parole et demande : « Est-ce que c’est l’Iran qui pratique un génocide à Gaza depuis vingt mois ? » « Non ! » lui répondent les participants. Mammad Mahmoud, Irano-Américain, un badge du candidat Zohran Mamdani à l’élection de la primaire démocrate pour le poste de maire accroché sur la poitrine, s’enhardit et s’empare du micro.
Cet opposant au pouvoir à Téhéran a quitté son pays il y a quinze ans, comme il l’explique pour faire comprendre que son refus de la guerre ne signifie pas un soutien à la République islamique. « Mais ce ne sont pas les bombes qui amèneront la liberté. Les gouvernements des États-Unis et d’Israël n’en ont rien à faire des peuples du Moyen-Orient. Ils veulent faire en Iran la même chose qu’en Irak. » Il lance, ému : « Ma mère a 77 ans, elle est seule à Shiraz. Je n’ai plus de contact avec elle, je ne sais pas si elle est vivante ou morte. »
Etan Mabourakh prend la parole au nom du National Iranian-American Council pour rappeler que « la diplomatie est le seul moyen de procéder. On ne veut pas que des vies américaines soient perdues pour défendre Netanyahou, Ben Gvir et Smotrich (deux ministres israéliens d’extrême droite – NDLR), alors que déjà des centaines d’Iraniens ont été tués. Ce sont les fauteurs de guerre contre les peuples ». Mariana, militante de gauche, explique que « les gens aux États-Unis ne veulent pas d’une guerre en Iran, ils rejettent cette guerre illégale de Trump et Netanyahou », avant de défiler dans le calme dans un Times Square qui est vite revenu à ses occupations habituelles.

© Dave Decker/Shutterstock/SIPA
À quelques centaines de kilomètres au sud de Times Square, à l’orée de Druid Hill Park, le poumon vert de Baltimore, principale ville du Maryland, ils ne sont que quelques dizaines à avoir répondu à l’appel de la coalition Answer, dimanche en fin d’après-midi, alors que le mercure approche de la barre des 100 degrés Fahrenheit (soit plus de 35 °C). La petite troupe est fixe au milieu du ballet des familles : celles qui repartent après un après-midi à l’ombre et celles qui viennent y chercher la très relative fraîcheur de la soirée.
« On ne peut pas leur en vouloir de mener leur vie en famille un dimanche », glisse un participant, tee-shirt frappé du logo du Planning familial, jetant un regard timide autour de lui. Son voisin n’est pas du même avis : « À force d’avoir toujours des bonnes raisons, on laisse tout faire. »
La présence d’un journaliste, étranger de surcroît, suscite la méfiance. Ashley et Jake, tee-shirts rouges, vérifient par quelques questions les raisons de notre présence. « OK, vous pouvez parler aux gens. » Un grand gars a mis un keffieh sur son visage et refuse de donner son identité mais pas son sentiment : « Le gouvernement américain fait la guerre aux musulmans dès qu’il le peut. À Gaza, il est complice du génocide. Au Liban, il a laissé faire Israël et maintenant il a fallu qu’il suive Netanyahou dans sa guerre contre l’Iran. »
Non à la guerre globale
Une équipe de la télévision locale vient couvrir la mobilisation, ce qui donnera au message des protestataires un écho presque inespéré. « Nous ne sommes peut-être pas très nombreux mais on représente cette opinion populaire : refuser une troisième guerre mondiale dans le seul intérêt des milliardaires », justifie Clara, non sans avoir préalablement rappelé le dégoût que lui inspirait cette décision de Donald Trump.
Des pancartes sont alignées sur l’herbe brûlante. On peut y lire : « Non à la guerre US-Israël contre l’Iran », « De l’argent pour les besoins. Pas pour une guerre contre l’Iran », « On ne se laissera pas entraîner dans une guerre globale ». Dans quelques secondes, les manifestants vont s’en emparer et les brandir, suscitant des coups de klaxon approbateurs.
Une militante de The Black Alliance for Peace s’écarte du groupe et va distribuer des tracts aux commerçants qui, aux abords du parc, vendent nourriture et boissons. « Ils n’ont pas tort mais je dois gagner ma vie, moi », lâche l’un d’eux, sans lever le nez des saucisses qu’il tourne.
Ailleurs, de Los Angeles (Californie) à Austin (Texas), la participation s’est avérée plus importante. À Washington, face aux grilles de la Maison-Blanche, les manifestants ont dénoncé l’aventure guerrière d’un président qui avait mené sa première campagne sur le refus de déclencher de nouvelles guerres et qui, dimanche soir, à rebours de sa posture antinéoconservatrice, a évoqué un possible changement de régime en Iran.
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