REPORTAGE. Guerre en Ukraine : "Qu’ils nous aident à l’arrêter par n’importe quel moyen", implorent les habitants avant la venue des dirigeants européens à Kiev

L'unité européenne s'affiche à Kiev samedi 10 mai. Les dirigeants français, britannique, allemand et polonais retrouvent leur homologue Volodymyr Zelensky. Le président ukrainien plaide toujours pour un cessez-le-feu de 30 jours sans condition et compte sur les Européens et les Américains pour l'imposer à Vladimir Poutine. Dans le Donbass, les habitants, eux, ne se font aucune illusion. S'ils apprécient ce soutien international, ils ne croient pas pour autant au succès d'une telle démarche.

Raïgorodok, près de Lyman, est à peine un village. Ce sont seulement quelques bâtiments coincés entre la voie ferrée et la nationale. À 700 km de la capitale, la rencontre du jour entre dirigeants européens est un peu abstraite, mais Oleg veut y croire. "Oui, c’est bien, il faut qu’ils se parlent davantage. La guerre se terminera plus vite", estime-t-il. Et dans ce village, la guerre, on sait ce que c’est. Ici, cela fait longtemps que les militaires sont bien plus nombreux que les civils.

Serhiy, 32 ans, en pantalon de treillis, a le regard étrangement fixe. "Rentrer vivant, c’est ça, mon souhait. Que chacun revienne vivant, chez lui, dans sa famille", confie-t-il. Mais quand on lui demande s'il pense que la guerre va bientôt s'arrêter, la réponse est sans appel. "Non, je n'y crois pas", tranche-t-il. "La guerre ne va pas arrêter et les Russes sont très très près", s'inquiète-t-il.

Fatigue, larmes et sourire amer

Tordre le bras de Vladimir Poutine et lui imposer une trêve de 30 jours en le menaçant de sanctions économiques massives s’il ne joue pas le jeu : cela relève d'un scénario irréaliste pour le commandant Olexander. "Ça n’arrivera jamais, lance-t-il dans un sourire amer. L’histoire nous a bien montré qu’on ne peut pas croire la Russie. Par le passé, la Russie n’a pas tenu ses promesses. Elle ne le fera pas plus maintenant. Au contraire, elle va en profiter pour se renforcer et continuer à faire ce qu’elle a commencé", assure Oleksander.

Svetlana, serveuse dans un camion qui vend des kebabs, regarde sans les voir les véhicules de transports de troupes qui passent à toute allure. "Même si c’est que ça, le soutien moral aussi est très important pour nous. Surtout si ça vient de gens haut placés", confie-t-elle, en évoquant la venue des chefs d'Etat. Mais elle est au bord des larmes et s'avoue fatiguée.

"Les deux premières années, c’était très dur, maintenant, tu le vis un peu autrement mais chaque jour tu attends la fin de cette guerre."

Svetlana, serveuse dans un camion de kebabs dans le Donbass

à franceinfo

"Qu’ils nous aident à l’arrêter par n’importe quel moyen", lâche-t-elle. Svetlana entend y compris une solution qui prévoirait de laisser à la Russie une partie des territoires qu’elle occupe, concession pourtant inimaginable il y a encore quelques mois.