Guerre en Ukraine : à Istanbul, Poutine un absent bien présent pour les premières négociations directes entre Kiev et Moscou

À Istanbul, les négociations entre Kiev et Moscou doivent débuter ce jeudi. Trois ans après l’invasion russe de l’Ukraine, cette rencontre ouvre un premier dialogue direct et sans intermédiaire depuis le printemps 2022. Si le président Volodymyr Zelensky devait se rendre en Turquie avec la délégation ukrainienne, son homologue russe n’a pas répondu à l’ultimatum. « La délégation russe attendra la délégation ukrainienne à Istanbul », a simplement répété le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

Pour l’expert en relations internationales et ancien chercheur au centre de réflexion Carnegie Vladimir Frolov, « Poutine n’y participera pas, mais enverra une équipe de haut niveau pour négocier et repartir de l’ancien texte discuté à Istanbul en avril 2022. Si Kiev acceptait de poursuivre les pourparlers sur la base de ce projet pour un futur règlement, alors Moscou pourrait s’engager sur un cessez-le-feu ». Côté états-unien, le président Donald Trump a confirmé que le chef de la diplomatie Marco Rubio participerait aux discussions en Turquie. La possibilité de s’y rendre dépendra de la présence du président russe.

Ankara, un solide intermédiaire

À Moscou, les noms du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et du conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, Iouri Ouchakov, ressortent comme faisant partie de la délégation. Ils avaient mené les pourparlers à Riyad lors de la rencontre bilatérale avec l’administration Trump, soit le secrétaire d’État Marco Rubio et le conseiller spécial Steve Witkoff, fin mars.

Le choix de la Turquie par le président russe est déjà un signe diplomatique. Depuis le début de la guerre, Ankara a servi d’intermédiaire entre les deux administrations, en livrant des armes à l’Ukraine et en refusant d’appliquer des sanctions contre Moscou. Outre le projet d’accord en avril 2022 (neutralité de l’Ukraine, territoires occupés, intégration à l’UE), le président turc Recep Tayyip Erdogan avait obtenu la signature de « l’initiative céréalière de la mer Noire » avec la Russie, l’Ukraine et les Nations unies en juillet 2022.

« Erdogan a de bons liens personnels avec Poutine et Zelensky, la Turquie ayant défendu une position neutre dans le conflit. À une époque où il n’y avait pas de contact entre les États-Unis et la Russie, Ankara a facilité les négociations entre le directeur de la CIA, William Burns, et le chef du renseignement russe, Sergueï Narychkine », rappelle Dimitar Bechev, spécialiste des Balkans dans Novaïa Gazeta.

Quelle position pourrait défendre le président russe, partagé entre gains militaires ou diplomatiques ? Au printemps, la grande offensive ne semble pas encore déclenchée. « Les véritables discussions sur les grandes orientations du pays ont lieu en coulisses et elles n’impliquent qu’un nombre très réduit de personnes autour de Vladimir Poutine. Mais ce dernier doit composer avec des acteurs puissants aux aspirations divergentes : technostructure sécuritaire, courants nationalistes, oligarques, acteurs économiques et l’opinion publique », explique Arnaud Dubien, le directeur de l’Observatoire franco-russe dans sa chronique à la RTBF.

La société s’avère partagée entre passivité, loyauté et une volonté de distanciation. Le centre Levada note, dans un sondage réalisé en avril : « Plus de la moitié des répondants (61 %) estiment qu’il est maintenant nécessaire de passer aux négociations, et un sur trois (30 %) déclare qu’il est nécessaire de poursuivre l’action militaire. »

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