Cash Investigation : l’intelligence artificielle a-t-elle pris le contrôle sur notre quotidien ?
En février, Paris a accueilli le sommet international sur l’intelligence artificielle (IA) au Grand Palais. Le président Macron, en parfait VRP, se gargarisait de cette révolution technologique et scientifique. « C’est un moment d’opportunité pour l’humanité », se réjouissait-il au 20 heures de Laurent Delahousse, sur France 2.
Le Cash Investigation dédié à l’IA diffusé ce soir lui en apprendra de bien belles. Car les équipes d’Élise Lucet se sont penchées en particulier sur ses interactions avec le monde du travail, ou le monde du chômage en l’occurrence pour beaucoup de salariés mis au rebut, car devenus soi-disant « obsolètes » pour le système capitaliste.
Ainsi, quand Onclusive, une société qui propose des revues de presse financières pour les entreprises cotées en Bourse, décide d’intégrer des modes de production utilisant l’intelligence artificielle, elle licencie 146 personnes, soit un tiers de ses rédacteurs et traducteurs, « remplacés par une machine qui œuvre en quelques secondes quand ça me prenait une à trois heures, selon le nombre de documents à synthétiser », déplore l’une des rédactrices expérimentées. Onclusive n’a conservé qu’une cinquantaine de postes pour corriger les fautes générées par l’intelligence artificielle.
Le progrès technologique annoncé pour soi-disant mieux apprendre, mieux nous soigner, mieux travailler vire au cauchemar. Aujourd’hui, les services de comptabilité sont menacés et ceux dédiés aux ressources humaines pourraient être remplacés par des programmes commercialisés qui font passer des entretiens d’embauche ou d’évaluation face à un avatar sur écran, en lieu et place d’un être humain et de ses préjugés. Le logiciel est programmé pour repérer les émotions sur un visage à travers la caméra, le froncement d’un front, la direction d’un regard, le rythme cardiaque, le changement de la couleur de la peau ou de la tonalité de la voix.
Les dessous des outils de l’État
« N’opposons pas l’humain et l’intelligence artificielle » semble être une devise martelée par différents représentants du gouvernement, lesquels ont signé en pagaille des contrats Ftap (fonds de transformation de l’action publique), activant la modernisation technologique en échange d’économies qu’il faut traduire par suppression de postes de fonctionnaire.
L’émission dévoile aussi les outils scandaleux développés pour l’État, comme le programme de recherche de fraudeurs du fisc, qui coûte bien plus qu’il ne rapporte, sans arriver à concurrencer le flair des agents. Ou encore Albert, le programme censé soulager les agents de France Services, dont les réponses sont totalement erronées.
L’enquête, vertigineuse, laisse un goût amer tant il est facile d’imaginer que nous sommes beaucoup à être guettés par ce « moment d’opportunité ». À moins que nous passions derrière les écrans, comme ces forçats du clic basés à Madagascar, au Cameroun ou au Bénin et qui, pour 35 centimes d’euro de l’heure, loin de notre Smic à 8,98 euros brut, nourrissent l’algorithme à coups de tâches fastidieuses, inintéressantes et répétitives.
Cash Investigation, France 2, 21 h 10
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