Accord UE-Mercosur : 44 organisations appellent Emmanuel Macron à "clarifier" la position de la France et œuvrer au blocage du texte

La France va-t-elle donner son feu vert à l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Mercosur ? Le changement de ton d'Emmanuel Macron et de l'exécutif interroge de nombreux syndicats et organisations de la société civiles opposées à ce projet. Dans une lettre ouverte diffusée mardi 28 octobre, 44 signataires, dont la Confédération paysanne, la CGT, Greenpeace ou encore France Nature Environnement (FNE), appellent Emmanuel Macron à "clarifier" la position de la France et à "construire une minorité de blocage" au niveau européen pour empêcher la ratification du texte.

"Nous (...) exprimons nos plus vives inquiétudes et notre totale incompréhension devant les réactions complaisantes provenant de l'Elysée et de plusieurs ministères suite à la décision de la Commission européenne de transmettre l’accord de libre-échange UE-Mercosur au Conseil des 27 Etats membres de l'Union européenne pour une ratification expresse et sans consultation démocratique des Parlements des États membres sur la partie commerciale de l’accord", écrivent les organisations dans ce courrier également adressé au Premier ministre, Sébastien Lecornu, et plusieurs de ses ministres.

Un "mauvais texte" ?

La position de la France semble en effet avoir évolué. En février, Emmanuel Macron avait critiqué un "mauvais texte" lors de sa visite au Salon de l'agriculture, après des mois de mobilisation du secteur contre le projet d'accord. Le président de la République avait assuré chercher une "minorité de blocage" au sein de l'UE, qui regrouperait suffisamment de pays pour empêcher la mise en œuvre du texte.

Pour tenter de rassurer la France, la Commission européenne a proposé début septembre des clauses de sauvegarde "renforcées" en cas de brusque hausse des importations depuis le Mercosur ou de brutale baisse des prix, avec un "suivi renforcé" des "produits sensibles". Des mesures largement insuffisantes aux yeux de l'ensemble des syndicats agricoles, qui ont maintenu leur opposition au texte.

Après des semaines de silence, Emmanuel Macron a affirmé, jeudi, attendre la "finalisation" des mesures promises par la Commission européenne ainsi que la "notification" de celles-ci aux pays du Mercosur, qui regroupe cinq Etats d'Amérique du Sud. "Aujourd'hui le gouvernement français, comme les autres d'ailleurs, attend ces réponses. Mais tout ça va dans le bon sens pour protéger les secteurs qui sont les plus exposés et aussi protéger les consommateurs européens", a-t-il poursuivi. Une position qui semble plus favorable au texte, déplorent les organisations de la société civile. En cas d'accord des Vingt-Sept, la signature de l'accord UE-Mercosur est envisagée le 19 décembre, selon le chancelier allemand Friedrich Merz.

"Nos inquiétudes et notre incompréhension sont d’autant plus vives que le contenu de l’accord n'a été l’objet d’aucune modification de substance depuis décembre 2024", jugent les organisations signataires de la lettre ouverte. Elles estiment que la France a abandonné ses lignes rouges, et que la clause de sauvegarde mise en avant par Bruxelles, dont l'application serait "par définition temporaire", n'écarte pas les risques liés à l'accord.

Près de 80% des agriculteurs considèrent que l'accord de libre-échange UE-Mercosur "représente une menace pour l’agriculture française", selon un sondage du Cevipof et d'Agro Toulouse réalisé entre avril et juin, auprès de 1 082 exploitants.