«Cette exposition va transformer la vision qu’on a de cette cité mythique» : au Musée Guimet, l’âge d’or du bronze à Angkor

Une présence monumentale qui produit son petit effet… Difficile de rester de marbre devant le premier chef-d’œuvre présenté par le Musée Guimet dans le cadre de sa nouvelle exposition intitulée « Bronzes royaux d’Angkor, un art du divin » ! À savoir, le Grand Vishnou du Mebon occidental, qualifié de « Joconde du Cambodge » pour sa haute dimension symbolique et historique. Datant du XIe siècle et découverte en 1936 sur le célèbre site archéologique, la sculpture apparaît aujourd’hui dans une configuration inédite puisque des fragments nouveaux ont été ajoutés à sa tête, son buste et ses bras après une restauration d’envergure.

Le résultat est à la hauteur des attentes des spécialistes, mais aussi du public qui observe une longue halte en se portant à sa hauteur. La représentation brille par sa majesté et donne un aperçu de l’ambition affichée par les quatre commissaires Pierre Baptiste, Brice Vincent, David Bourgarit et Thierry Zéphir, qui explorent ici une période comprise entre le IXe siècle et l’époque contemporaine. Un travail de longue haleine, les premiers contacts avec leurs homologues ayant été pris en… 2017.

Grand Vishnou du Mebon occidental, XIe siècle. Musée national du Cambodge

Bien entendu, le Musée national du Cambodge a largement contribué à faire de ce parcours un rendez-vous majeur. Au total, il a accordé 126 prêts à l’institution française sur les 240 objets (statues, stèles, récipients…) dévoilés sur place. Un ensemble – où figurent également en bonne place les collections du Musée Guimet – qui a de quoi offrir un panorama complet de l’art du bronze dans cette région du monde… « Cette exposition va transformer la vision qu’on a de cette cité mythique », prévient la présidente des lieux, Yannick Lintz. On ressent d’emblée une réelle impression d’immersion, favorisée par la parfaite luminosité des vitrines qui contraste avec la pénombre diffusée dans les salles. Dépaysement garanti pour le visiteur, qui se retrouve au cœur des temples de l’Empire khmer qui abritaient des pièces extraordinaires… mais si rarement mises à l’honneur en Europe !

Fragments rares

« L’écrasante majorité n’a jamais été montrée en France, explique Pierre Baptiste. Les bronzes constituent généralement un petit supplément dans les expositions dédiées à Angkor. C’est la première fois qu’on les découvre ainsi, avec une telle ampleur. » À titre d’exemple, la section baptisée « Fondre pour le roi » ne manque pas d’objets conçus par des artisans savamment équipés d’outils en tout genre. Rien ne manque pour expliquer leurs différentes techniques de fabrication dans les ateliers. Le raffinement y était de mise. Les thématiques s’enchaînent. L’aspect religieux et spirituel est plus particulièrement étudié dans la partie suivante où il est question de la montée en puissance de l’hindouisme et du bouddhisme dans les premiers siècles de notre ère.

Au Musée Guimet, l’âge d’or du bronze à Angkor

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Des représentations de Shiva, Vishnou et Bouddha, plus somptueuses les unes que les autres, se succèdent au fil des salles et au gré des décennies. Des fragments retrouvés récemment enrichissent le parcours. Des films, réalisés avec précision, reconstituent des statues détruites. Le propos est didactique et vivant. À la grande satisfaction des autorités cambodgiennes qui ont assisté la semaine dernière au vernissage. « De notre côté, nous nous réjouissons toujours de nous inscrire dans une coopération en apportant notre expertise, concluent les organisateurs. Nous ne nous contentons pas de faire venir des œuvres, de les présenter, de les restituer puis de passer à autre chose. Nous sommes fiers de proposer un accompagnement au long cours. » Une démarche qui fait encore ses preuves aujourd’hui.

« Bronzes royaux d’Angkor, un art du divin », Musée Guimet, Paris 16e, jusqu’au 8 septembre. sdp