Sur TikTok, un syndicat de jeunes médecins innove pour alerter sur les dangers de certains conseils santé

Sur TikTok, les influenceurs santé séduisent les utilisateurs, malgré des conseils parfois jugés dangereux par la profession. tashatuvango / stock.adobe.com

Les influenceurs santé multiplient les conseils pour améliorer votre condition physique. Si certains d’entre eux sont de véritables médecins, d’autres créateurs de contenu sans aucune compétence médicale donnent des recommandations jugées dangereuses par le syndicat médical ReAGJIR.

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Comment perdre du poids en quelques jours ? Comment guérir rapidement d’un rhume carabiné ? Quelle recette de grand-mère utiliser pour avoir un regain d'énergie le matin ? Sur TikTok, impossible de ne pas tomber sur ces vidéos postées par des influenceurs santé qui délivrent des conseils pour améliorer votre condition physique. Le problème ? Si on retrouve parmi eux des professionnels du secteur, des créateurs de contenu sans aucune compétence médicale sont également largement suivis, et ce même si les conseils prodigués se révèlent inexacts ou même dangereux.

Conscient du problème, le syndicat médical ReAGJIR lance une campagne en ligne, HealthBuster, pour mettre les créateurs de contenu face à leurs responsabilités. Le principe ? Via un compte TikTok qui ambitionne de sensibiliser aux risques des conseils médicaux erronés, le syndicat confronte les auteurs de ces vidéos à la dangerosité de leurs recommandations. En utilisant la technologie du deepfake et avec la collaboration de professionnels du secteur, ReAGJIR recrée les vidéos des influenceurs ayant relayé des conseils médicaux douteux en montrant cette fois les conséquences négatives associées à ces pratiques.

Deepfake pour intriguer les utilisateurs des réseaux sociaux

Par exemple, un des contenus du compte reprend la vidéo d’une jeune femme conseillant à sa communauté de s’insérer des gousses d’ail dans les narines pour décongestionner les bronches. En utilisant un deepfake, le syndicat fait dire de manière artificielle à la jeune femme que « ce conseil ne vous guérira pas et il aurait pu avoir des risques sur ma santé ». À la fin de chaque vidéo le syndicat précise qu’il s’agit d’une intelligence artificielle et fait intervenir un professionnel de santé qui détaille point par point les risques médicaux de telles pratiques.

« En utilisant le deepfake on espère avoir une accroche pour intriguer les jeunes. On ne veut pas avoir uniquement un discours institutionnel qui peut rebuter les utilisateurs des réseaux sociaux. On veut reprendre les codes des plateformes » explique le Docteur Raphaël Dachicourt, médecin généraliste basé à Croix (Nord) et président national du syndicat ReAGJIR. Organisation professionnelle créée en 2008, ce syndicat représente les médecins généralistes remplaçants, installés depuis moins de 5 ans et les jeunes universitaires de médecine générale. « Nous sommes de jeunes professionnels. On est, nous aussi, sur les réseaux sociaux. On peut porter une voix médicale et jeune » avance-t-il.

« Parfois on a peur de ce qu’on voit »

Selon lui, si les personnes plus âgées peuvent aussi tomber sur des conseils erronés en ligne, les jeunes, souvent en meilleure santé, consultent moins le corps médical. « Souvent, mes patients me demandent mon avis sur des conseils santé qu’ils ont vus sur les réseaux sociaux. Parfois on a peur de ce qu’on voit. On peut faire de la prévention auprès de nos patients mais les jeunes prennent moins rendez-vous chez le médecin. Donc il y a une partie de la population à laquelle on n’a pas accès » s’inquiète le Docteur Dachicourt.

Si les vidéos publiées sur le compte TikTok HealthBuster ne cumulent pas encore beaucoup de visionnages, le syndicat espère gagner en visibilité. « On va continuer notre campagne tant qu’on pourra. Pour l’instant, on a surtout des retours des professionnels du secteur qui nous félicitent pour l’initiative » précise le Docteur Dachicourt.

Une charte publiée par l’Ordre des médecins

En janvier, le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) rendait publique la « charte du médecin créateur de contenu responsable » visant à encadrer les bonnes pratiques des professionnels du secteur de la santé qui partagent leur expertise en ligne. Avec cette charte déclinée en dix principes, l’Ordre ambitionne de « favoriser une information médicale à la fois rigoureuse et accessible et de protéger la santé publique ».

En la signant, les professionnels s’engagent à produire sur les réseaux sociaux du contenu pédagogique, médical et scientifique vulgarisé, et à ne faire la promotion « d’aucune pratique ou thérapeutique non validée scientifiquement ».