«Un tremblement de terre» : la presse internationale sidérée par l’ampleur de l’offensive douanière de Trump
D’immenses drapeaux américains en arrière-plan et un Donald Trump à l’air conquérant, brandissant fièrement le tableau des tarifs douaniers exorbitants que les États-Unis s’apprêtent à appliquer à leurs concurrents. L’image s’affiche sur la page d’accueil de la plupart des médias internationaux. Cette mise en scène étonnante dans la roseraie de la Maison-Blanche a suscité quelques commentaires ironiques. «L’événement avait des allures de jeu télévisé», commente le quotidien britannique The Times, qui croyait voir le président américain actionner une roue de la fortune en hurlant «Inde ! Voyons voir ce que vous avez gagné ! Vingt-cinq pour cent ! Indonésie ? Ne vous inquiétez pas, vous ne rentrerez pas les mains vides. Vous aurez un peu moins.» Pour son confrère d’outre-Manche, The Guardian , «on se serait cru sur un plateau du juste prix», où la récompense serait «une guerre commerciale mondiale». Le gagnant : «Trump bien sûr». Les perdants : «Tout le monde.» Plus que comme un joueur, le président agit, selon le quotidien allemand Suddeutschezeitung «comme un artiste solo, mêlé à un autocrate».
Mais le caractère humoristique de cette conférence n’a pas été perçu par tous : l’éditorialiste de l’Australian Financial Review a jugé les déclarations d’hier après-midi «glaçantes» et elle n’est pas la seule à exprimer son inquiétude. Le journal bruxellois Le Soir constate que «c’est tout un système commercial, tel qu’il avait été construit après la Seconde guerre, qui est visé par cette rafale de tarifs». L’Espagnol El País parle d’un «mur tarifaire sans précédent depuis un siècle», quand Le journal suisse Le Temps évoque «une guerre commerciale bien plus intense que redoutée», dont les foudres touchent particulièrement la confédération helvétique. En Chine, pays dont les produits seront les plus taxés par les Américains, à hauteur de 34%, le choc est immense. «C’est comme un tremblement de terre qui va créer un tsunami de turbulences et de troubles pour l’économie mondiale», écrit le média d’État China Daily, avant d’attaquer la stratégie américaine : «Les États-Unis déstabilisent le cadre commercial mondial dans le vain espoir de reconquérir leur prééminence perdue.»
«Le risque inflationniste de ce pari protectionniste»
Au-delà de l’effet de sidération des annonces, plusieurs médias critiquent les répercussions économiques dévastatrices de ces mesures, pour les États-Unis autant que pour les pays ciblés. «En réalité, cela entraînera une hausse des prix et un ralentissement de la croissance», analyse The Guardian. Le Temps souligne «le risque inflationniste» de ce «pari protectionniste». Le New York Times estime quant à lui que cette escalade significative «risque de faire grimper les prix pour les consommateurs et les fabricants américains». Les avantages attendus pour les travailleurs américains, à savoir une stimulation de la croissance grâce à des investissements massifs sont mis en doute par El País. Selon le quotidien espagnol, «les effets néfastes se feront sentir rapidement, tandis que l’impact des nouveaux investissements, s’il arrive bel et bien, sera très lent à se matérialiser».
Le séisme économique risque d’être tel, selon certains observateurs, que la population américaine pourrait finir par se détourner massivement de son président. Le magazine américain de tendance libérale, The Atlantic, estime que «détruire l’économie ne renforcera pas le soutien à Trump» et prévoit que son second mandat soit «un échec catastrophique». Pour le Spiegel, la popularité du chef d’État pourrait évoluer «si les États-Unis sombrent dans une récession ou si l’industrie américaine ne parvient pas à prospérer». Quant aux possibilités d’action des Européens face à cette offensive commerciale sans précédent, elles existent selon La Stampa . Le média italien affirme que l’UE dispose «d’une puissance de feu et d’une taille de marché qui lui permettent de traiter avec les États-Unis sur un quasi-pied d’égalité». Toutefois, le journal se veut lucide : «Désormais, rétablir une relation de libre-échange complet avec les États-Unis de Donald Trump serait illusoire».