Mort de la grande compositrice russe Sofia Goubaïdoulina, à 93 ans
La compositrice russe Sofia Goubaïdoulina nous a quittés jeudi 13 mars à l'âge de 93 ans en Allemagne, où elle vivait depuis l'éclatement de l'Union soviétique en 1991, a annoncé son éditeur de musique classique, Boosey & Hawkes, sur son site internet. Elle est décédée « à son domicile près de Hambourg », précise-t-il, rendant hommage à une « grande dame de la musique contemporaine ».
Sofia Goubaïdoulina était notamment membre de l'Académie des arts de Berlin et de l'Académie royale suédoise de musique, rappelle Boosey & Hawkes. Compositrice russe non-conformiste, l’artiste a été l'un des talents les plus singuliers de la création musicale de son temps. Alliant diverses traditions, ses œuvres originales étaient tombées sous le coup de la censure soviétique. Autrice d'œuvres symphoniques et chorales, de concertos pour divers instruments et de quatuors à cordes, elle était restée dans l'ombre pendant de nombreuses années avant de s'imposer comme l'une des voix les plus douées de la scène musicale internationale.
Ayant bravé la censure soviétique et repoussé les limites du réalisme socialiste imposé par le régime, la compositrice a partagé sa vie entre son URSS natale où elle gagnait sa vie à créer des musiques de films et l’Allemagne, où elle est partie pour se consacrer à la recherche musicale.
Liste des auteurs « décadents »
Née en 1931 au Tatarstan, une république russe située sur les bords de la Volga, Sofia Goubaïdoulina était la fille d'un ingénieur géodésique et d'une institutrice, au sein d'une famille mixte russo-tatare. Petite-fille d'un mollah, elle se fera baptiser au sein de l'Église orthodoxe en 1970, aux dépens de l'athéisme prôné par le système soviétique, mais les sons rituels musulmans joueront un rôle crucial dans ses futures œuvres.
Reçue au sein de l'Union des compositeurs soviétique, la compositrice a d'abord gagné sa vie en composant des musiques de films, signant une vingtaine de titres. Jugée idéologiquement « peu fiable », elle est inscrite en 1979 sur la liste noire des auteurs «décadents» de l'Union des compositeurs soviétiques. Elle y figure avec six autres musiciens dont l'œuvre est interdite en URSS et qui n'ont pas le droit de publier leurs partitions. Ce n'est qu'après l'éclatement de l'URSS fin 1991 qu'elle s'installera en Allemagne, avec son mari de l'époque, un théoricien de la musique russe qui l'aidera dans sa recherche, dans une maison près de Hambourg où elle passera le reste de sa vie.