«Les chauffeurs conduisent avec la peur au ventre» : en banlieue lyonnaise, les bus victimes de nouveaux caillassages

Des chauffeurs qui prennent le volant la peur au ventre, escortés par des véhicules de police. Une semaine après la reprise de la desserte de Rillieux-la-Pape par les transports en commun lyonnais (TCL), le trafic des bus a de nouveau été suspendu dans le quartier de la Velette en ce début de semaine. Le fort dispositif sécuritaire déployé le long du parcours n’a pas permis d’éviter les caillassages. Au début de mois de novembre, deux bus avaient été brûlés par des émeutiers dans cette commune de la banlieue nord de Lyon, classée prioritaire en politique de la ville, suscitant un émoi important. Le quartier avait été privé de transports pendant dix jours. Cette décision avait d’ailleurs été attaquée en justice par le maire.

«Il fallait marquer le coup. Nous avons demandé un acte fort pour éviter un droit de retrait sur la totalité du réseau. Les chauffeurs ont apprécié la décision de Keolis et du Sytral, raconte Riad Marzouki, secrétaire général CGT TCL. Ils conduisent avec la peur au ventre, pour leur sécurité et celle des passagers. L’autre fois, ils ont réussi à faire sortir tout le monde mais s’il y a quelqu’un qui dort au fond du bus sans qu’on le voie, il brûle avec». Trois des six bus brûlés depuis 2020 l’ont été à Rillieux-la-Pape. Cette année, les lignes qui traversent la ville ont été 170 fois déviées ou suspendues, souvent à la demande de la police municipale ou nationale, dans une commune où les dégradations sont régulières, en réponse à l’action des forces de l’ordre sur les points de deal.

Friture sur la ligne

Des chiffres que conteste Alexandre Vincendet, le maire Horizons de cette ville de 30.000 habitants, qui a attaqué la décision de Bruno Bernard, président écologiste de la métropole et du Sytral (autorité régulatrice des transports à Lyon), vilipendant une «rupture de service public». «Quand ça tire à la “kalach” à Villeurbanne, arrête-t-on les bus ?», éructe-t-il auprès du Figaro. «Ces mesures disproportionnées et inadaptées face à des comportements stupides et inacceptables visent clairement à nuire à la liberté de déplacement des Rilliards et à porter atteinte aux efforts des forces de l’ordre, de la justice et de la municipalité pour assurer à la population l’accès au service public des transports», a dénoncé l’ex-député par voie de communiqué.

Au Figaro, le maire assure avoir demandé, en vain, des mesures d’urbanisme à la métropole, comme l’enterrement des silos à verre pour éviter qu’ils ne fournissent en projectiles les émeutiers. Et l’édile de proposer une convention entre sa police municipale et le Sytral, ainsi que le raccordement des boutons d’alarme des bus au centre de supervision urbain de Rillieux-la-Pape. Des mesures qui seraient déjà en place selon Bruno Bernard, soulignant par ailleurs la baisse de la délinquance sur le réseau de transports lyonnais depuis 2020 et l’arrivée des écologistes aux commandes. «Rien qu’en 2024 : 15 interventions conjointes ont déjà été réalisées entre vos équipes et nos agents de sécurité. Pour faciliter ce travail, Sytral a même prêté un bus à votre police municipale afin qu’elle puisse s’entraîner spécifiquement à ces opérations», a-t-il répondu.

Le trafic devait reprendre mercredi avec un dispositif de sécurité renforcé et la présence de médiateurs dans les bus. «Les conducteurs sont attachés à la continuité du service pour les habitants du secteur, ça nous fait mal au cœur de laisser gens sur carreau», conclut Riad Marzouki.