Cannes 2025 : Hasan Hadi, Caméra d’or pour The President’s Cake

Un réalisateur irakien à Cannes ? En fait, ils étaient même deux. Hasan Hadi et Kameran Husni, le premier à la Quinzaine des réalisateurs, le second à Cannes Classics. Deux Irakiens parmi les 28 prétendants - un record - pour la Caméra d’or. Mais celui qui vient de remporter la Caméra d’or, après le Prix du public à la Quinzaine des réalisateurs, a une histoire pas banale. Le destin d’Hasan Hadi n’avait pas grand-chose pour emprunter la voie cinématographique. En recevant son prix dans le grand théâtre Lumière du Palais des festivals, Hasan Hadi a bien sûr remercié le Festival de Cannes et a souligné que c’est « la première fois qu’un film irakien reçoit un prix à Cannes ». Un film qui « rend hommage au peuple irakien ».a-t-il souligné sans oublier de saluer « tous les enfants qui ont participé à The President’s Cake et qui m’ont inspiré au milieu de la dictature ».

Né dans un pays alors sous sanctions américaines et dirigé par Saddam Hussein, il n’a jamais mis les pieds dans un cinéma. Et pour cause, dans les années 1990, les salles étaient fermées. Pour voir un film, le seul moyen était de récupérer des cassettes VHS sous le manteau. Et de prendre ce qu’il trouvait, soit des dessins animés des films de Godzilla ou du Tarkovski. Difficile dans ces conditions de se construire une culture. De plus, ses parents jugeaient d’un assez mauvais œil une carrière artistique. Comment leur en vouloir quand la vie quotidienne est pavée de difficultés pour simplement se nourrir. Hasan Hadi a donc misé sur des études de business, qu’il a brillamment réussies. Puis s’est lancé dans des études de cinéma.

Bien lui en a pris. Présenté à la Quinzaine des réalisateurs en ce 78Festival de Cannes, The President’s Cake  est son premier film. « C’est un très grand rêve, dit-il. Surtout comme irakien, car ce n’est pas habituel d’entendre parler de réalisateurs irakiens. Contrairement aux Iraniens qui, en plus, viennent souvent à Cannes. » Cet homme souriant et au regard pénétrant mesure bien sa chance de participer pour la première fois à la manifestation cannoise. Tourné en Irak, son film raconte la course de Lamia, 9 ans, pour trouver des œufs, du sucre et de la farine afin de concocter un gâteau pour l’anniversaire du président Saddam Hussein. Une histoire inspirée de celle d’Hasan Hadi. Pendant la présidence du dictateur, des élèves étaient désignés pour apporter des fleurs, des fruits et un gâteau le 28 avril, jour de naissance de Saddam. Une année, Hasan Hadi a été désigné pour apporter les fleurs. « Mes parents étaient soulagés. Nous n’avions qu’à aller dans un champ pour les cueillir », raconte-t-il.

S’il pense que son film sera projeté dans les salles irakiennes, Hasan Hadi affirme en rigolant qu’il n’aurait jamais pu être montré dans son pays sous Saddam Hussein. Pourtant, le tournage, qui s’est entièrement déroulé en Irak, n’a pas été si facile et il confie sans retenue que « c’est un miracle qu’il existe, même si je n’ai pas été censuré par le gouvernement ». Choisi des acteurs non professionnels qui ne disposaient pas du scénario a sans doute ajouté de la difficulté, mais le cinéaste voulait des personnages aussi vrais que possible. Auréolé de la Caméra d’or, il doit entrevoir maintenant les portes qui vont s’ouvrir et l’aider à écrire d’autres histoires.