Syrie : la Constitution et le Parlement suspendus pour trois mois par le nouveau pouvoir

Ce jeudi, le G7 s’est dit prêt jeudi à soutenir une transition vers un gouvernement «inclusif et non sectaire» en Syrie tandis que l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a indiqué que plusieurs frappes aériennes israéliennes avaient visé les alentours de la capitale Damas. Le Figaro fait le point sur la situation.

La Constitution et le Parlement suspendus  

Le nouveau pouvoir en Syrie va «geler la Constitution et le Parlement» pendant la période transitoire de trois mois, a indiqué jeudi à l’AFP le porte-parole des affaires politiques du nouveau gouvernement, Obaida Arnaout. «Un comité juridique et des droits humains va être formé pour examiner la Constitution puis effectuer des amendements», a-t-il expliqué. La Constitution actuelle date de 2012 et ne spécifie pas que l’islam est la religion d’État. Les rebelles conduits par des islamistes radicaux qui ont pris le pouvoir dimanche en Syrie ont nommé un chef de gouvernement transitoire, Mohammad al-Bachir, qui assurera ses fonctions jusqu’au 1er mars 2025.

Mohammad al-Bachir dirigeait jusqu’à présent le «Gouvernement de salut» du bastion rebelle d’Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie. M. Arnaout a indiqué qu’une réunion s’était tenue mardi «entre des ministres du gouvernement de salut et les anciens ministres (du pouvoir de Bachar al-Assad) pour effectuer le transfert de pouvoir». «Cette période transitoire durera trois mois», a ajouté Obeida Arnaout. «Notre priorité est de préserver les institutions et les protéger», a assuré le responsable. Il était interviewé par l’AFP au siège de la radiotélévision syrienne, où se sont installés des représentants des nouvelles autorités, aux côtés des fonctionnaires du pouvoir déchu.

À l’issue d’une offensive fulgurante de onze jours, une coalition de groupes rebelles dominée par les islamistes radicaux de Hayat Tahrir al-Sham (HTS) a renversé dimanche le pouvoir de Bachar al-Assad qui a pris la fuite en Russie. M Arnaout a assuré que le nouveau pouvoir voulait instituer «un État de droit», après plus d’un demi-siècle de règne du clan Assad, marqué par la répression. Il a ajouté que «tous ceux qui ont commis des crimes à l’égard du peuple syrien seront jugés conformément aux lois». Interrogé au sujet des libertés religieuses et personnelles, il a répondu: «nous respectons les diversités religieuse et culturelle en Syrie, qui resteront telles quelles». Dans le pays à majorité musulmane sunnite, Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite, se posait en protecteur des minorités qui ont craint d’être prises pour cibles par les nouvelles autorités.

Le G7 prêt à soutenir une transition vers un gouvernement «inclusif et non sectaire»

Le G7 s’est dit prêt jeudi à soutenir une transition vers un gouvernement «inclusif et non sectaire» en Syrie et appelé ses nouveaux dirigeants à soutenir les droits des femmes, l’État de droit et «les minorités religieuses et ethniques». «Nous sommes prêts à soutenir un processus de transition conduisant à un gouvernement qui soit crédible, inclusif et non sectaire, qui garantisse le respect de l’État de droit, des droits de l’Homme universels, de la liberté d’expression et de la démocratie», a indiqué le Groupe des 7 dans un communiqué, tout en tenant Bachar el-Assad «responsables de ses crimes». Ils ont affirmé leur «soutien total à un processus de transition politique inclusif dirigé par les Syriens (...) dans l’esprit des principes de la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies» de 2015, qui a approuvé un processus de paix en Syrie.

Les nouveaux maîtres de la Syrie cherchent à rassurer la communauté internationale

Le premier ministre chargé de la transition à Damas cherche à rassurer la communauté internationale quatre jours après la chute de Bachar el-Assad, alors que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, est arrivé jeudi en Jordanie pour discuter de la situation. À l’issue d’une offensive fulgurante de onze jours, une coalition de groupe rebelles dominée par le groupe islamiste sunnite radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) a renversé dimanche le pouvoir de Bachar el-Assad qui a pris la fuite en Russie. Alors que des pays occidentaux s’inquiètent de la façon dont le nouveau pouvoir va traiter les nombreuses minorités en Syrie, le premier ministre, Mohammad al-Bachir, veut rassurer.

«Nous garantirons les droits de tous (...) et de toutes les confessions en Syrie», a-t-il affirmé mercredi dans une interview au quotidien italien Corriere della Sera. HTS affirme avoir rompu avec le djihadisme mais il reste classé mouvement «terroriste» par plusieurs pays occidentaux, dont les États-Unis. M. Bachir a en outre appelé les Syriens exilés à rentrer chez eux pour «reconstruire» le pays, à majorité arabe sunnite, où vivent plusieurs communautés ethniques et confessionnelles.

Asile : Jadot juge «indécente» la réaction des pays européens

Le sénateur écologiste Yannick Jadot a jugé jeudi «indécente» la réaction de nombreux gouvernements européens à la chute de Bachar el-Assad, qui se sont aussitôt focalisés sur le retour des réfugiés plutôt que sur l’aide à la reconstruction. «Je trouve ça indécent», a déclaré M. Jadot sur Franceinfo, interrogé sur les décisions de plusieurs pays européens de suspendre l’examen des demandes d’asile de ressortissants syriens et, pour certains comme l’Autriche, de prévoir l’expulsion des réfugiés déjà accueillis.

En France, «on a 700 demandes d’asile de personnes syriennes (en attente) à l’Ofpra. Donc franchement, il n’y a pas d’invasion, il n’y a pas de crise», a souligné l’ancien député européen. Les Européens «n’ont pas aidé les Syriens face à Bachar el-Assad. On les a abandonnés sous les bombes russes et sous les bombes du Hezbollah et de l’Iran», a-t-il rappelé.

Selon lui, l’Europe devrait «proposer une aide à la reconstruction, une aide à l’installation de la démocratie, y compris pour mettre la pression sur le nouveau régime syrien sur le respect des droits des femmes et des minorités». «Cela stabilisera un peu une région qui manque terriblement de stabilité», a-t-il jugé. Certes, «il y a beaucoup d’incertitudes» mais «la situation est aussi porteuse d’un avenir plus bienveillant pour les Syriens», a-t-il espéré.

Une ONG fait état de frappes israéliennes près de Damas

L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a indiqué jeudi que plusieurs frappes aériennes israéliennes avaient visé les alentours de la capitale Damas, prise par les rebelles syriens dimanche.

«Des frappes aériennes israéliennes ont ciblé les alentours de Damas», résonnant dans toute la capitale, selon des journalistes de l’AFP sur place. Depuis dimanche, Israël a mené des centaines de frappes contre des sites militaires appartenant à l’armée du président déchu Bachar el-Assad.

L’ONU dénonce la «barbarie inimaginable» endurées dans les centres de détention

Les images ces derniers jours de la sinistre prison syrienne de Saydnaya et d’autres centres de détention en Syrie montrent la «barbarie inimaginable» que les Syriens ont endurée depuis des années, a dénoncé l’émissaire de l’ONU jeudi. «Ces images témoignent d’une souffrance indicible et d’une douleur qui dépasse l’entendement, endurées par les détenus, leurs familles et leurs proches», a déclaré Geir Pedersen dans un communiqué.