Les socialistes rassurés ? Lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, mardi 21 octobre, le Premier ministre a annoncé que la suspension de la réforme des retraites serait ajoutée au projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) par "lettre rectificative" jeudi en Conseil des ministres. Ce procédé permet au gouvernement "de modifier ou de compléter un projet de loi déjà déposé devant le Parlement, avant son examen par la première assemblée saisie", explique le Conseil d'Etat.
Sébastien Lecornu répondait aux interrogations de Marine Le Pen, présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale et de Boris Vallaud, président du groupe PS. Ces derniers craignaient que si les débats – limités à cinquante jours pour le PLFSS – ne permettaient pas d'arriver à voter, le gouvernement légifère par ordonnances et reprenne en ce cas le budget initialement présenté, dans lequel ne figure pas la suppression de la réforme des retraites.
Emmanuel Macron trouble le jeu
Leurs peurs avaient été renforcées par le chef de l'Etat qui, en marge d'un déplacement en Slovénie, a été interrogé sur la suppression de la réforme phare de son second quinquennat promise par son Premier ministre. "Il a fait un choix pour apaiser le débat actuel" sur le projet de budget 2026 et la potentielle censure du gouvernement, a lancé le président de la République. Mais cela ne signifie "ni l'abrogation, ni la suspension" de la réforme de 2023, seulement un "décalage d'une échéance (…), à savoir le relèvement progressif de l'âge légal de départ", a-t-il ajouté, semant le trouble chez les opposants au gouvernement.
"Je comprends qu'un doute s'empare de ces bancs sur la capacité à aller jusqu'à cette partie 3 du PLFSS", a répondu Sébastien Lecornu. "J'ai pris un engagement, c'est que le débat puisse avoir lieu. Il aura lieu comme le veut la démocratie et comme le veut le fonctionnement de l'Assemblée nationale et du Sénat", a-t-il confirmé lors de sa réponse au député PS des Landes, réaffirmant, comme il l'avait dit lors de sa déclaration de politique générale, que la suspension concernerait tant la mesure sur l'âge légal que l'augmentation du nombre de trimestres de cotisation.
Sur son compte X, Boris Vallaud a salué cette "nouvelle étape vers la concrétisation de cette victoire obtenue grâce à la mobilisation sociale et à l'action des socialistes".
Mais cette décision pourrait avoir des conséquences sur le calendrier des débats budgétaires. Le budget de la sécurité sociale (PLFSS) devait commencer à être examiné en commissions des Affaires sociales jeudi. Son président, le député Horizons Frédéric Valletoux explique que "la lettre rectificative aurait la forme juridique d'un nouveau projet de loi de financement de la Sécurité sociale". "On ne va pas commencer à discuter" du projet de loi jeudi alors qu'il y en a "un autre qui arrive", cela "me semble compromis" a-t-il ajouté, en évoquant notamment la nécessité de rouvrir un délai d'amendement pour les députés.
Frédéric Valletoux a regretté de ne pas avoir été prévenu en amont de l'annonce du Premier ministre.