L’Ozempic, médicament antidiabétique, suspecté d’augmenter le risque d’une maladie rare de l’œil

On ne leur connaissait jusqu’à maintenant pas de défauts, ou quasiment pas. Mais les médicaments à base de sémaglutide pourraient en fait être à l’origine d’une complication grave touchant la vision. L’Ozempic, célèbre médicament du laboratoire danois Novo Nordisk prescrit aux diabétiques de type 2, pourrait augmenter le risque d’une maladie rare du nerf optique. C’est ce que suggèrent deux études danoises publiées récemment, comme l’avait déjà fait une étude américaine publiée l’été dernier. 

Tout est parti d’une observation faite par l’équipe du Pr Jakob Grauslung, spécialiste de la rétinopathie diabétique à l’hôpital universitaire d’Odense (Danemark). «À l’hôpital, nous avons remarqué que depuis l’arrivée de l’Ozempic sur le marché en 2018, le nombre de cas de neuropathie optique ischémique antérieure non artéritique (NAION) au Danemark a augmenté», rapporte-t-il dans un communiqué publié par l’université. «Là où nous voyions auparavant 60 à 70 cas de NAION par an, nous en enregistrons désormais jusqu’à 150, et plus souvent des patients atteints de diabète de type 2», précise le médecin. 

Un risque multiplié par deux

Le Pr Grauslung et ses collègues ont analysé le dossier médical de 424.000 personnes atteintes de diabète de type 2 au Danemark. Parmi elles, environ un quart était sous Ozempic entre 2019 et 2023. «Nous avons constaté qu’Ozempic fait plus que doubler le risque de NAION», indique le médecin. Cette maladie se manifeste lorsqu’un arrêt soudain de l’apport sanguin au nerf optique provoque une lésion sur le nerf en question. Malheureusement, cette maladie, pour laquelle il n’existe pas de traitement, peut entraîner une perte de vision très importante et permanente.

La seconde étude (en prépublication), menée au Danemark et en Norvège par le Pr Anton Pottegård, est arrivée aux mêmes conclusions avec une méthode différente. Leur travail a consisté à recenser combien de patients, parmi ceux ayant commencé un traitement par Ozempic après 2018, ont développé une neuropathie optique, par rapport aux patients traités avec un autre antidiabétique. Leur conclusion : avec l’Ozempic, le risque de NAION est quasiment multiplié par trois. 

Les scientifiques soulignent que ces résultats ne sont encore que des corrélations. Autrement dit, l’implication directe du médicament sur la survenue de cette pathologie oculaire reste à prouver. Par ailleurs, cette maladie est très rare et le risque qu’elle survienne chez un patient donné restera faible, quoi qu’il arrive. Ainsi, les chercheurs estiment que, pour 10.000 personnes traitées avec de l’Ozempic chaque année, entre 1,5 et 2,5 cas supplémentaires devraient être observés. 

Évaluer la balance bénéfices-risques

Par ailleurs, les scientifiques danois rappellent que, quand il n’est pas traité, le diabète de type 2 peut aussi aboutir à des complications oculaires, moins graves que le NAION mais beaucoup plus fréquentes. Comme pour tout médicament, il s’agit d’évaluer les bénéfices et les risques de l’Ozempic, au cas par cas. Les auteurs des études rappellent qu’il n’est pas de leur ressort de recommander aux patients diabétiques d’arrêter leur traitement. «Il ne s’agit ni d’effets secondaires plus graves ni plus fréquents que les rares effets secondaires de nombreux autres médicaments que nous utilisons», indique le Pr Anton Pottegård.

Quant au Wegovy - chimiquement identique à l’Ozempic -, prescrit aux personnes obèses pour ses effets amaigrissants, il n’a pas encore pu être étudié. En effet, son arrivée sur le marché est encore récente et il faut davantage de recul (et donc de données) aux chercheurs. Mais, selon Anton Pottegård, il existerait également des cas de NAION parmi les utilisateurs de Wegowy. D’après les premières données, le risque serait toutefois nettement inférieur qu’avec l’Ozempic : les personnes diabétiques seraient donc plus exposées que les personnes obèses.