François Bayrou opposé à l’exécution provisoire de la possible peine d’inéligibilité de Marine Le Pen

Après Gérald Darmanin et Édouard Philippe, c’est au tour de François Bayrou d’afficher une réserve avec la sévérité des réquisitions du parquet dans le procès des assistants parlementaires des eurodéputés Front national (ex-Rassemblement national). Au centre de toutes les attentions : la peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution provisoire, réclamée par l’accusation contre Marine Le Pen.

Si cette demande était suivie par les magistrats l’année prochaine, la députée du Pas-de-Calais pourrait être privée d’une nouvelle candidature à la magistrature suprême en 2027. Alors que l’ancien ministre de l’Intérieur avait estimé que la chef de file des députés nationalistes devait être «combattue dans les urnes, pas ailleurs», le président du Modem, relaxé au mois de février dans une affaire semblable à celle qui touche le RN, s’est fait le chantre des principes démocratiques.

Invité dimanche soir de BFMTV, François Bayrou a jugé que l’exécution provisoire «serait un problème». «Dans une démocratie, on doit pouvoir faire appel de toutes les décisions», a insisté le centriste, qui rappelle que «plusieurs élus» MoDem ont été sanctionnés de la sorte en début d’année. Affirmant avoir «combattu le Front national sans aucune interruption à toutes les élections et à tous les débats», le maire de Pau pense alors qu’un empêchement de Marine Le Pen d’ici la présidentielle amènerait certains citoyens à «considérer qu’il y a quelque chose qui biaise la vie démocratique».

Bayrou «n’aime pas» l’injustice

Sur le plan judiciaire, François Bayrou a d’ailleurs exprimé «avec prudence» une forme de soutien à l’égard du RN, dont l’ancêtre est accusé d’avoir fait travailler ses assistants parlementaires européens pour des missions internes au parti. «Tout le monde dans cette affaire est prisonnier des mots. On s’est laissé entraîner à mettre sous les mêmes termes des réalités complètement différentes, et on n’a pas su le dire», a tempêté le triple candidat à la présidentielle. 

Et de poursuivre son raisonnement : «On dit “détournement de fond public” et tout le monde pense à l’action publique. Ce n’est pas vrai : les fonds dont il s’agit ne sont pas des fonds d’action publique. Ce sont des fonds dont le but est exclusivement le soutien aux parlementaires.» Soit «les partis politiques auxquels ils appartiennent». Certes, François Bayrou ne partage pas les «idées» du RN. Mais, il assume : «Je n’aime pas l’injustice, même quand elle est faite à mes adversaires.»

Selon lui, un parlementaire «est élu par son parti politique, parce qu’il porte l’étiquette de son parti politique, et ne peut être réélu que parce que son parti le soutiendra». Avant de faire le parallèle entre les élus MoDem et ex-FN, des «parlementaires minoritaires» pour qui le «seul soutien est le parti politique auquel on appartient». De quoi rejoindre peu ou prou l’argumentaire du président du RN Jordan Bardella, qui évoque un simple «désaccord administratif» entre son mouvement et le Parlement européen sur l’utilisation des fonds.