UFC 315 : le combat de la rédemption pour Benoît Saint-Denis
Sa défaite contre la légende Dustin Poirier était largement due à un staphylocoque, une infection qui l’avait lourdement handicapé, empêché de s’exprimer à la hauteur de son talent et de sa préparation. Son premier round plus que compétitif laisse encore un goût de regret, et une certitude : il a en lui le niveau des meilleurs. Qu’importe : perdre contre cet adversaire n’est en rien déshonorant. Sa défaite plus douloureuse contre Renato Moicano a elle aussi une raison susceptible de tout expliquer : sans coach principal, portant seul la charge du plan de jeu, de son programme d’entraînement, avec un coin guère structuré, il n’avait pas les cartes en mains pour gagner.
Ces deux combats pris individuellement pourraient ressembler à deux simples faux pas, liés à des facteurs extra-sportifs. Hélas la réalité est extrêmement dure ; c’est un sport de l’instant. «On est aussi fort que son dernier combat» dit le proverbe. Il y a deux cases rouges d’affilée sur son record. Dans n’importe quelle autre catégorie, ces deux défaites peuvent avoir des conséquences limitées. Pas chez les poids-légers, division la plus remplie et la plus relevée de l’UFC (voire de tous les sports de combat confondus). Cette fois il faut gagner, quel qu’en soit le moyen. Soumission, KO, décision des juges après un combat moche ; gagner.
À lire aussi MMA : Manon Fiorot dans «le parfait timing» avant son combat pour la ceinture UFC
BSD (treizième de la division) devait combattre Joel Alvarez (espagnol, quinzième). Est-ce un adversaire trop relevé pour un combat de relance ? Peut-être. Y avait-il un autre choix ? Non. Chez les -70kg, il n’y a plus d’adversaire facile dans le top trente. Trouver un autre adversaire aurait signifié prendre quelqu’un d’à peine moins bon que Joel Alvarez mais d’énormément moins bien classé. Les calculs ne sont pas bons. Pour avoir moins d’adversité, il aurait fallu monter dans la division du dessus des -77kg. Puisque ça n’a pas été l’option choisie, Joel Alvarez est un choix pertinent. En cas de défaite, il sera toujours temps d’envisager à nouveau cette possibilité. BSD a-t-il cicatrisé physiquement et psychologiquement ? S’il se présente à l’heure et au poids, c’est que oui. Pour l’heure, place au combat.
Changement d’adversaire
Coup de théâtre dont ce sport est coutumier, Alvarez est forfait sur blessure. Il fallait trouver un autre adversaire. Le Polonais Mateusz Gamrot (septième de la division) s’est proposé, mais demandait un délai d’une semaine de plus. L’UFC et l’équipe de management de Benoît (la BTT dirigée par Guillaume Peltier) se sont mis d’accord sur une solution alternative : faire resigner un certain Kyle Prepolec, poids-léger régional de l’étape qui avait perdu ses deux combats à l’UFC en 2019, et qui devait combattre dans une organisation locale le même jour. Le fait de faire signer un combattant, qui n’avait pas vraiment brillé qui plus est, peut être interprété comme un bon signe de la part de l’organisation, qui prend soin de la carrière de Benoît Saint-Denis.
BSD devrait le surpasser en tous points, singulièrement en lutte offensive. Mais attention : en cas de victoire, il n’y a rien à gagner en termes de classement. En cas de défaite, ce serait une catastrophe. Il y a néanmoins lieu de se réjouir : ce sera un combat plus accessible qui devrait lui permettre de goûter à nouveau à la victoire, remettre du vert dans son record, reprendre confiance en lui en attendant un défi plus à sa hauteur. En bref un bon combat de relance. À condition de prendre avec le plus grand sérieux cet adversaire. Les renseignements sur ce dernier ne sont pas inexistants : il est doué en boxe pied-poing, et a en particulier des coups de pied haut dangereux. Si BSD enclenche la marche avant et met sa pression habituelle, il devrait pouvoir terminer le combat avant la limite.
Ce combat, qui aura lieu chez nos cousins québécois à Montréal, sera le premier de Benoît Saint-Denis sous la houlette de Nicolas Ott. Après sa séparation houleuse avec Daniel Woirin, et l’échec de sa stratégie solitaire, BSD a effectué une excellente réflexion et fait un choix objectivement bon en rejoignant l’écosystème Ott. Il y trouve un réservoir de sparring-partners issus de l’élite nationale et mondiale, de son poids et des poids du dessus. Nicolas Ott est en outre de sa génération : il a à cœur non pas de tout savoir, mais d’être un coordinateur entre les différents spécialistes. Pour Benoît, c’est le Cubain Luis Mariano Gonzalez en boxe anglaise, Christophe Savoca pour le ju-jitsu (sol) et l’excellent Maxime François en lutte. De très bons instrumentistes que Nicolas Ott met en musique dans une partition commune, en collaboration avec son combattant. En l’espèce, il confie avoir trouvé en Benoît un mental très réceptif et une grande capacité d’analyse.