Tarn : démantèlement d'une filière de traite d'êtres humains après une enquête dans un restaurant à Albi

Une filière de traite d'êtres humains a été démantelée après une enquête dans un restaurant à Albi (Tarn), qui a déclenché une enquête nationale, a appris "ici Occitanie" vendredi 17 janvier auprès du parquet d'Albi.

En avril 2024, un des plus grands buffets d’Occitanie, Saveurs Gourmandes, a reçu un contrôle du Comité départemental anti-fraude (Codaf). Ce restaurant de 450 couverts pouvait recevoir un millier de clients par jour. Le contrôle a révélé que le restaurant hébergeait des salariés à l’étage de l’établissement dans des conditions indignes.

Une enquête préliminaire a été confiée par le parquet d’Albi à l’antenne de l'Office de lutte contre le trafic illicite de migrants, de la police aux frontières (OLTIM) de Toulouse et à la Direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités du Tarn (DDETS 81). Les investigations se sont poursuivies en octobre 2024, sur le plan national. Dans cette enquête, le Groupe interministériel de recherches (GIR) de Toulouse a été co-saisi, ainsi que l'Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI). Ces investigations ont abouti au démantèlement d’une filière de traite des êtres humains.

Cinq personnes interpellées

Les salariés étaient hébergés et exploités dans des conditions contraires à la dignité humaine. Les enquêteurs ont notamment démontré que les durées d’emploi dépassaient largement les taux horaires légaux, pour des salaires fortement minorés et non déclarés. Leur hébergement se faisait dans des locaux inadaptés. Les responsables du restaurant d'Albi ont été interpellés en début d'année et placés en garde à vue. Le restaurant a fermé ses portes il y a quelques jours. 

En tout, cinq personnes (trois hommes et deux femmes, âgées de 39 à 45 ans) ont été interpellées lundi dernier, à Albi et en région parisienne. Quatre personnes ont ensuite été présentées jeudi au magistrat instructeur et mises en examen des chefs de "traite des êtres humains en bande organisée". Elles sont aussi suspectées d’emploi d’étranger non muni d’une autorisation de travail et d’exécution, en bande organisée, d’un travail dissimulé. Ces quatre personnes vont aussi être poursuivies pour "aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier d’un étranger en France". Elles devront répondre aussi de "soumission de plusieurs personnes vulnérables ou dépendantes à des conditions de travail indignes".

Saisie de 530 000 euros d'avoirs

Enfin, le magistrat instructeur a aussi lancé des poursuites judiciaires pour blanchiment en bande organisée. Trois des suspects (dont les propriétaires du restaurant d’Albi) ont été placés en détention provisoire, le quatrième a été placé sous contrôle judiciaire. A ce jour, 18 victimes ont été identifiées. Plus de 530 000 euros d’avoirs criminels ont été saisis : de l'argent liquide, des comptes bancaires, des véhicules, des bijoux et des montres de luxe.

Six salariés de ce buffet d’Albi avaient déjà été reconnus coupables par le tribunal d’Albi le 12 décembre pour avoir utilisé de faux-papiers, alors qu'ils étaient employés dans des conditions similaires. Ils ont écopé d’une peine de trois mois de prison avec sursis pour cinq d’entre eux et de deux mois de prison avec sursis pour le sixième. La CGT avait alors parlé d’une décision "indigne" du tribunal d’Albi : "Ce sont des victimes qui ont été déclarées coupables !" Le syndicat qui suit ces six jeunes salariés depuis plusieurs mois se félicite du démantèlement de la filière.