« Ni abus, ni fraudes, mais des situations médicales sérieuses » : les généralistes vent debout contre la pression de l’Assurance maladie sur les arrêts de travail

Dans un premier temps, ils seraient environ 500 médecins généralistes dans le viseur de l’Assurance maladie. Une nouvelle fois, comme en 2023-2024, il est question de « mise sous objectif ». Entendez, mettre la pression sur les praticiens les plus prescripteurs d’arrêts maladie, avec des objectifs chiffrés à la baisse à respecter dès le 1er septembre, alors qu’une deuxième série de mesures s’annonce déjà pour le 1er janvier 2026.

L’objectif affiché par l’Assurance maladie est de freiner la hausse continue des indemnités journalières, dont les dépenses ont augmenté de 6,7 % sur les quatre premiers mois de 2025, selon les résultats du comité d’alerte sur les dépenses d’assurance maladie. Un manque à gagner de 500 millions d’euros, assure-t-on. Les syndicats de médecins sont immédiatement montés au créneau.

« Ce qui nous pose problème, c’est que cette nouvelle campagne ne vise que les arrêts longs », a dénoncé la Dre Agnès Giannotti, présidente de MG France, lors d’une conférence de presse. C’est-à-dire des arrêts liés à des pathologies lourdes, comme un cancer ou des maladies professionnelles. La présidente de MG France l’affirme : « Ces prescriptions ne sont ni des abus, ni des fraudes, mais bien des réponses à des situations médicales sérieuses, sans autre solution immédiate pour le patient ».

Une impasse éthique

Réduire ces arrêts maladie reviendrait à une impasse éthique pour les praticiens. « Dans la plupart des cas, le médecin a une pratique parfaitement normale et raisonnable, et son seul moyen de baisser de 20 % le chiffre de prescription sera de brimer ses patients ». Les syndicats appellent les médecins concernés à refuser de signer ces « mises sous objectif ». Un refus qui déclenche automatiquement une « mise sous accord préalable ».

Désormais, chaque arrêt de travail prescrit devra obtenir l’aval du médecin-conseil de l’Assurance maladie, ce qui aura pour conséquence d’allonger les délais pour les patients et d’alourdir la charge administrative. Cette campagne lancée dans une pure logique d’économies ne fera que raviver la fracture entre les médecins et l’institution. Une fois de plus, c’est prendre le problème par le mauvais côté. Tous les baromètres qui se sont penchés sur l’absentéisme au travail dressent le même constat.

Un déni de la pénibilité du travail

En 2024, le groupe Apicil, acteur majeur de la prévoyance en France, expliquait notamment dans son « observatoire des arrêts de travail », que les principales causes des arrêts longs (supérieurs à 30 jours) sont les pathologies psychologiques (fatigue psychologique, dépression longue, syndromes de burn-out…) et les troubles musculo-squelettiques (TMS) pour les salariés des secteurs où la pénibilité est forte et pour ceux qui ont une posture « statique longue ».

Les salariés les plus à risque ? Sans surprise, on retrouve les travailleurs à faible qualification, les seniors, les femmes. Et parmi les secteurs le plus touchés : la santé, l’économie sociale, l’éducation, les transports, le commerce, l’industrie et le BTP. Pas besoin d’être grand spécialiste pour affirmer que le recul de l’âge de départ à la retraite ne fera qu’accentuer cette tendance. Une tendance déjà visible. Selon le baromètre 2022 de Malakoff Humains, depuis 2009, le taux d’emploi des 50-64 ans a progressé de 10 points, atteignant 67 %. Et 17 % des arrêts qui leur sont prescrits sont des arrêts longs.

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