Ligue des champions : Brest-PSG, entre tout à gagner et tout à perdre
«Ah putain…». Pierre Lees-Melou ne cachait pas sa déception, à la fin du premier tour, en apprenant que Brest affronterait assurément un club de Ligue 1 en barrages de Ligue des champions. Paris ou Monaco. Ce sera Paris. Match aller ce mardi (18h45, Canal+ Foot) au stade de Roudourou, à Guingamp. Néophytes en coupe d’Europe, les Bretons auraient préféré vivre la magie à plein régime en affrontant un club étranger. Au lieu de cela, ils défieront leur bête noire dans les joutes nationales, un PSG face à qui ils n’ont plus gagné depuis le 26 janvier 1985, soit une série de 30 matchs sans victoire.
Magie ou pas, historique défavorable ou pas, les hommes d’Eric Roy n’attaquent évidemment pas cette double-confrontation en tant que victimes expiatoires. Ils veulent créer l’exploit, une fois de plus, eux qui ont gagné leur place en C1 grâce à une campagne 2023-24 ébouriffante en L1. Quitte à faire appel à… «Ethan Hunt», le héros de la série Mission impossible, comme en plaisante Éric Roy. «Dans Mission Impossible, ce sont toujours des missions impossibles, mais au final, ils y arrivent», ajoute-t-il.
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Brest ne va «pas se renier» face à Paris
Ticket dont ils se sont montrés dignes en remportant quatre de leurs huit matchs jusqu’ici (Graz, Salzbourg, Prague, PSV), avec un nul contre Leverkusen (1-1). Trois défaites, dont deux face à des géants, à Barcelone (3-0) et contre le Real (0-3). De grands souvenirs, images gravées à jamais dans la mémoire des supporters brestois. Et pourquoi pas renverser la table encore une fois, se hisser en huitièmes contre le Barça ou Liverpool ? Ça ne coûte rien de rêver. Surtout quand on met les ingrédients pour s’en donner les moyens. Et Brest ne va «pas se renier» face à Paris, dixit Éric Roy.
Romain Del Castillo («incertain»), Brendan Chardonnet, Pierre Lees-Melou et compagnie pourront toujours se souvenir qu’ils ont toujours donné du fil à retordre aux Rouge et Bleu sur les dernières saisons, même si les résultats ont souvent été défavorables. Ils avaient même été chercher le nul au Parc des Princes en début d’année (2-2). Ousmane Dembélé s’était fendu d’un doublé. Une bizarrerie statistique à l’époque, l’ailier tricolore étant plus connu pour ses dribbles que sa capacité à conclure.
Sauf qu’aujourd’hui, personne ne serait surpris de le voir claquer deux buts à Guingamp. D’autant qu’il a inscrit un triplé contre cette même équipe de Brest le 1er février dernier (2-5), à Francis-Le-Blé… Symbole d’un PSG longtemps plombé par son inefficacité, notamment en C1, Dembélé s’est mué en goleador patenté ces dernières semaines. Paris a fait le choix de ne pas signer un buteur de calibre international après le départ de Kylian Mbappé, l’été dernier, misant sur le collectif. C’était sans imaginer le coup de chaud de l’ancien Barcelonais, de plus en plus à l’aise en faux 9 et qui découvre les joies de l’efficacité à 27 ans. 21 buts depuis le début de la saison, dont 16 sur ses 10 derniers matchs. Fou. Ce n’est pas la seule raison qui explique la présence du PSG en barrages. Un PSG qui n’affichait qu’un total que quatre buts et autant de points après cinq journées.
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Changement de braquet
C’est tout Paris qui a haussé le ton, se montrant plus agressif, plus entreprenant, plus désireux de faire mal et pas juste de contrôler. Un joueur personnifie à la perfection ce changement d’état d’esprit, Bradley Barcola. Bambi a laissé pousser ses bois. Et le PSG a remporté ses trois derniers matchs de C1 (Salzbourg, City, Stuttgart) pour s’inviter dans le Top 24, grimpant même jusqu’à la 15e place au classement. Les Rouge et Bleu, qui ont, en plus, débauché l’ailier géorgien Khvicha Kvaratskhelia durant le mercato d’hiver, sont même invaincus toutes compétitions confondues depuis le 26 novembre et leur défaite face au Bayern, à Munich (1-0). Série en cours de 16 matchs.
On a parlé d’année de transition, de déclassement, y compris dans nos pages. C’était vrai, un temps. Luis Enrique et ses joueurs ont trouvé la clé pour se donner le droit de rêver. Peut-être pas au sacre européen. Mais assez pour retrouver des ambitions sur la scène européenne, avec la perspective d’un duel XXL face aux Reds ou aux Blaugrana. Éric Roy a répété que le PSG version 2024-25 a «une dimension supplémentaire» sur le plan collectif par rapport à la saison écoulée, décrivant «une équipe complète au sein de laquelle tout le monde travaille à la perte».
Sauf qu’avant de se voir à Anfield ou au stade de Montjuïc, les Parisiens, demi-finalistes en 2024, doivent déjà faire le boulot face à Brest. Moins de magie pour les Bretons ? Imaginez pour Marquinhos - qui disputera son 100e match européen avec le PSG - et ses petits camarades… Pour le Stade brestois, ça reste une affiche de prestige, l’excitation des premières fois, la perspective d’un exploit fou. Et ce n’est que du bonus au final, sachant qu’une présence en barrages semblait illusoire en début de campagne.
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Évidemment que nous sommes favoris, mais le football est plein de surprises et ne récompense pas l’équipe qui joue le mieux
Luis Enrique
Pour Paris, il n’y a pas d’autre issue que la qualification. Aucune alternative. Pas d’élimination glorieuse qui tienne, pas d’excuse, aucune explication ne serait entendable. Une sortie de piste représenterait un fiasco, peut-être le plus gros de son histoire européenne. Les Parisiens n’ont pas le droit à l’erreur, tandis que les Brestois ont tout à gagner. «Il n’y aura pas d’excès de confiance de notre part», promet Luis Enrique. Et d’ajouter : «Évidemment que nous sommes favoris, mais le football est plein de surprises et ne récompense pas l’équipe qui joue le mieux».
Ambiance Coupe de France sur la plus grande scène européenne pour ce duel du pot de fer contre le pot de terre. La magie, c’est aux Bretons de la créer. Comme ils ont bien failli le faire le 1er février, malgré un score très lourd par rapport à la qualité du football qu’ils ont déployé, leur courage, leur audace, leur solidarité, leurs qualités en somme. Un vrai message pour Paris, qui visera à faire en sorte que le train arrive à l’heure ce mardi, tandis que Brest «aura pour objectif d’être toujours en vie au moment de rentrer sur la pelouse du Parc des Princes». «On n’est pas dans le même monde que le PSG», constate Éric Roy. À ses joueurs de réduire l’écart, le temps d’un soir.