Narcotrafic : Retailleau évoque «un point de bascule» après les fusillades à Rennes et Poitiers

Après une fusillade sanglante à Poitiers où un adolescent de 15 ans est entre la vie et la mort, et, une semaine avant, la blessure par balle d’un garçonnet près de Rennes, Bruno Retailleau a jugé vendredi qu'on était «à un point de bascule» face aux trafics de drogue. Le ministre de l'Intérieur est arrivé peu avant 15h dans la capitale bretonne, selon des journalistes de l'AFP sur place.

Il s'est dans un premier temps rendu dans le quartier populaire de Maurepas, haut-lieu du trafic de drogue de Rennes et théâtre de nombreux règlements de compte ces derniers jours. L'enfant blessé de deux balles dans la tête samedi dernier était originaire de ce quartier, de même que son père. Bruno Retailleau devait ensuite rencontrer des policiers et des élus à la préfecture d'Ille-et-Vilaine.

«Point de bascule»

«Les "narcoracailles" n'ont plus de limites (...) Ces fusillades, ça ne se passe pas en Amérique du Sud, ça se passe à Rennes, à Poitiers (...). On est à un point de bascule», s'était exclamé dans la matinée sur BFMTV/RMC le ministre de l'Intérieur. Il a fait valoir qu'on avait désormais «le choix entre la mobilisation générale ou alors la "mexicanisation" du pays».

À Poitiers, «vers 22H45» jeudi soir, a-t-il relaté, «ça a commencé par une fusillade devant un restaurant et ça s'est achevé par une rixe entre bandes rivales qui a engagé plusieurs centaines de personnes». Il a évoqué «4 à 600 personnes» ayant participé ou assisté à cette rixe, en citant «un compte rendu du préfet». Selon les premiers éléments de l'enquête, il y aurait moins d'une centaine de personnes impliquées, entre «40 à 60», a indiqué une source policière. «Lors de l'intervention des secours, plusieurs centaines de personnes étaient aux abords et une rixe a débuté, certains jeunes en désignant d'autres comme potentiellement proches de l'auteur présumé», a précisé par la suite sur BFMTV le préfet de la Vienne Jean-Marie Girier.

Lors de cette fusillade, cinq personnes ont été blessées dont plusieurs grièvement. Selon une source policière, un adolescent de 15 ans a reçu une balle dans la tête et était entre la vie et la mort. Deux jeunes de 16 ans font aussi partie des blessés graves, selon une autre source policière.

La maire écologiste de Poitiers, Léonore Moncond'huy, a évoqué «un épisode inédit» dans l'histoire de cette ville d'environ 90.000 habitants, qui «témoigne d'une évolution assez lourde de la société».

«Briser l'écosystème»

Loin de Poitiers, près de Valence, un homme d'une vingtaine années était lui aussi entre la vie et la mort après avoir reçu dans la nuit de jeudi à vendredi une balle dans la tête lors d'une fusillade devant une discothèque. Des faits liés à des trafics de drogue, selon la police.

Ces événements sont survenus une semaine après qu'un enfant de cinq ans a lui aussi été atteint d'une balle dans la tête, à Pacé, près de Rennes. Il est toujours entre la vie et la mort, a dit vendredi le ministre. «L'enquête avance», a-t-il ajouté, promettant des renforts «le temps qu'il faudra». Le garçon était dans la voiture de son père qui tentait de fuir des trafiquants de drogue.

Depuis sa nomination au ministère de l'Intérieur, Bruno Retailleau plaide pour que la lutte contre le narcotrafic devienne «une cause nationale». Il souhaite une mobilisation contre les trafics de drogue à l'image de ce qui a été fait contre le terrorisme. «Nous allons mettre en place une "task force" pour briser l'écosystème» du trafic de drogue, a-t-il dit vendredi, en insistant sur l'importance d'une «stratégie globale» pour tenter d'endiguer le phénomène. 

Le trafic de drogue génère un chiffre d'affaires de trois à six milliards d'euros en France, selon les estimations de la commission d'enquête sénatoriale. Vendredi prochain, Bruno Retailleau doit se rendre avec son collègue de la Justice Didier Migaud à Marseille où les règlements de compte entre narcotrafiquants sont particulièrement meurtriers et sordides, avec l'implication de jeunes de 14-15 ans comme tueurs à gages. Les deux ministres doivent y annoncer ensemble plusieurs mesures.