Édition: Albin Michel en pole position pour s’emparer du groupe Humensis
La nouvelle était attendue depuis plusieurs mois déjà dans le petit monde de l’édition française. Ce mercredi, le réassureur Scor a officialisé son entrée en négociations exclusives avec le groupe d’édition Albin Michel pour la vente d'Humensis, qui détient entre autres les maisons Éditions de l'Observatoire, Presses universitaires de France (PUF), Belin et Éditions des Équateurs.
Scor avait formulé son souhait de se séparer d’Humensis il y a quelques mois, après la disparition en juin 2023 de Denis Kessler, très attaché à cet actif. Cela faisait depuis l’été 2024 que Francis Esménard, le petit-fils du fondateur d'Albin Michel et président du holding propriétaire du groupe éditorial, affrontait ainsi Antoine Gallimard pour s’emparer de ce groupe d’édition reconnu… « Le projet industriel d’Albin Michel, qui est déjà un pied dans l’univers du scolaire et qui a des ambitions de développement sur la littérature et les sciences humaines a plus séduit », explique aujourd'hui un proche du dossier.
Selon nos informations, le choix du juste candidat, comme celui du juste prix, avait été retardé par l’instabilité politique et l’incertitude autour de la réforme des programmes scolaires. Ces réformes, qui entraînent un renouvellement des manuels scolaires, sont cruciales pour Humensis puisque son pôle éducation (Belin, Classico, Boscher…) représente la moitié des revenus du groupe. Son chiffre d'affaires peut monter à 55 millions d'euros, contre 45 millions d'euros pour les exercices sans réforme. « Pour valoriser Humensis, le groupe est parti du principe qu’il n’y aurait qu’une petite réforme », raconte une autre source. La valorisation du groupe d'édition oscillerait autour de 20 à 25 millions d'euros, poursuit ce proche du dossier géré par la banque d'affaires Gimar & Co.
De son côté, Muriel Beyer, directrice générale adjointe du groupe Humensis et fondatrice des Éditions de l’Observatoire, devrait rester en poste pour quelques années encore. Cette période de négociations exclusives, qui s’est ouverte pour deux mois, s’annonce complexe, alors que les deux parties devront évaluer la meilleure allocation du personnel.
Albin Michel à l’offensive
Humensis a peiné à être rentable au fil des années. Le groupe a réduit quelque peu ses pertes l'an passé, après un trou de 4 millions d'euros en 2022. Les Éditions de l'Observatoire se rapprochait de l'équilibre financier, grâce notamment au succès de Gaspard Koenig et de son roman Humus, lauréat du prix Interallié, du prix Jean Giono et finaliste du Goncourt.
De son côté, Albin Michel, groupe à actionnariat familial, est le sixième groupe d'édition français, avec un chiffre d’affaires consolidé de 231 millions d’euros. Il affiche, pour sa part, une bonne santé financière permise entre autres par les succès d'auteurs comme Mélissa Da Costa, Amélie Nothomb ou Éric-Emmanuel Schmitt.
« D'une certaine façon, plus les groupes devant vous grandissent, plus vous êtes un peu obligé de grossir… Il faut être un expansionniste raisonnable », confiait en juillet dernier au Figaro Francis Esménard. Selon nos informations, Albin Michel espérerait que Humensis rejoigne à terme son segment de distribution.
Preuve de sa solidité financière, Albin Michel ouvrait il y a un an une nouvelle librairie à Paris. Le groupe a acheté les murs, dans le quartier où se trouve son siège, à Montparnasse, alors que la librairie Albin Michel était jusque-là locataire dans un autre endroit, boulevard Saint-Germain.