« Le Procès de Klaus Barbie » : France 2 sur les traces des crimes du Boucher de Lyon
Il existe des regards que personne ne peut oublier. Voici le fil conducteur habilement choisi par Gabriel Le Bomin pour mettre en récit le premier procès en France de crimes contre l’humanité, celui de Klaus Barbie, chef de la Gestapo de Lyon, assassin de Jean Moulin et coupable de la torture et de la déportation de plus de 14 000 juifs et résistants.
Car c’est bien son regard perçant de cynisme et son sourire aiguisé comme une lame de couteau qui ont permis de confondre le boucher de Lyon, réfugié en Bolivie, à plus de 10 000 kilomètres de l’Europe. Grâce à la décision législative de Robert Badinter, alors ministre de la Justice, d’enregistrer l’intégralité du procès, ce regard est archivé pour l’histoire. Cette documentation sert de matière première à la réalisation de cette série documentaire.
Et Barbie devint Klaus Altmann
Le réalisateur consacre une grande partie du premier épisode à expliquer comment ce nazi de premier rang a échappé si longtemps à la justice. D’abord avec l’aide des États-Unis, admiratives des compétences anticommunistes de Klaus Barbie, qui organisent son extradition en Bolivie.
Il y prend une nouvelle identité, Klaus Altmann, et se met au service du régime militaire. Les hésitations des autorités françaises ont aussi joué en sa faveur, comme en témoigne dans ce documentaire Régis Debray, ancien conseiller du président de la République François Mitterrand.
Mais un couple, Béate et Serge Klarsfeld, ne lâche rien. En 1972, Beate Klarsfeld se rend à La Paz, accompagnée de journalistes, afin de confondre le nazi. L’homme, qui se pense intouchable, accepte une interview télévisée. Le cameraman Christian Van Ryswyck effectue alors un zoom pour l’histoire : saisi par le regard du bourreau, il réalise un plan serré sur ses yeux.
Le retentissement est immédiat en France : ses victimes n’ont aucun doute, « un tel regard, on ne peut l’oublier », assurent-elles. Le boucher de Lyon est formellement identifié par ceux-là mêmes qu’il a torturés. Klaus Barbie est finalement livré à la France le 4 février 1983, après la chute du régime dictatorial bolivien.
Après quatre années d’instruction, le 11 mai 1987, le procès de Klaus Barbie s’ouvre à Lyon. Les extraits d’archives de l’enregistrement du procès permettent aux téléspectateurs du XXIe siècle de revivre chaque témoignage des victimes juives et résistantes qui ont défilé à la barre, libérées de la présence de Klaus Barbie, qui n’a participé qu’à deux jours d’audience. En revanche, celles et ceux qui ont été confrontés à leur bourreau ont tous voulu le regarder dans les yeux pour le confondre.
La cour d’assises du Rhône a été spécialement aménagée pour ce procès hors norme où la « justice ordinaire » doit s’appliquer. Les procureurs adjoints et les avocats encore en vie témoignent avec vigueur dans ce documentaire de la façon dont ils ont dû appliquer le droit en échappant à la pression médiatique. Ce film tend aussi à affirmer que ce procès reste dans l’histoire comme étant celui de Jacques Vergès, qui a défendu avec outrecuidance le boucher de Lyon. Le 3 juillet 1987, le regard toujours aussi noir et le sourire pincé esquissant de véhéments sourires, Klaus Barbie reçoit son verdict : coupable de crimes contre l’humanité.
Le Procès de Klaus Barbie, France 2, 21 h 10
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